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Le Conseil de presse blâme Quebecor pour voyeurisme

Le Conseil de presse du Québec (CPQ) blâme quatre filiales de la société Quebecor pour ce qui s'apparente à du voyeurisme. Il juge que les journalistes Andrew McIntosh et Kina Adamczyk de l'Agence QMI ont porté atteinte à la vie privée de Geneviève Morand, alpiniste amateur, dans un article paru dans Le Journal de Montréal,…

Le Conseil de presse du Québec (CPQ) blâme quatre filiales de la société Quebecor pour ce qui s'apparente à du voyeurisme. Il juge que les journalistes Andrew McIntosh et Kina Adamczyk de l'Agence QMI ont porté atteinte à la vie privée de Geneviève Morand, alpiniste amateur, dans un article paru dans Le Journal de Montréal, Le Journal de Québec, et sur le site Canöe. Quatre cadres sont également mis en cause.

Le Conseil de presse du Québec (CPQ) blâme quatre filiales de la société Quebecor pour ce qui s'apparente à du voyeurisme. Il juge que les journalistes Andrew McIntosh et Kina Adamczyk de l'Agence QMI ont porté atteinte à la vie privée de Geneviève Morand, alpiniste amateur, dans un article paru dans Le Journal de Montréal, Le Journal de Québec, et sur le site Canöe. Quatre cadres sont également mis en cause.

Accident spectaculaire

En avril 2010, Geneviève Morand et son conjoint sont victimes d'un grave accident d'alpinisme au Mont Rainier, dans l'État de Washington. Coincée au fond d'une crevasse, Mme Morand appelle le 911 local, un appel à l'aide teinté d'une détresse profonde puisque le couple craint de mourir sur place. Les secouristes interviennent néanmoins rapidement et rien ne permet d'établir qu'il y a eu une quelconque faute de leur part. Les deux Québécois sont sauvés.

5 mois après l'accident, les journalistes de QMI publient pourtant un texte intitulé «Ne me laissez pas mourir ici», dans lequel ils retranscrivent la conversation de la Québécoise avec le 911 américain sans son consentement. Des extraits audio de l'échange sont également mis en ligne. Le tout est d'ailleurs encore disponible sur Internet. Choquée Mme Morand porte plainte au CPQ. «C’est notre détresse profonde vécue alors que nous combattions la mort qui est étalée au grand public», souligne-t-elle.

Couverture dénuée d'intérêt public

Pour le gardien de la déontologie journalistique, c'est du voyeurisme. «Il n’y avait pas d’intérêt public à publier ni à diffuser, sans consentement, ces extraits de conversation puisqu’il n’y avait pas lieu de démontrer de faute ni de la part du personnel du 911 ni de la part des Rangers venus porter secours à Mme Morand. Il n’y a eu aucun détail sur l’accident lui-même, les circonstances, les erreurs commises, ce qui aurait pu informer les adeptes de ce sport. Le seul intérêt de cet article était d’exposer la détresse de la plaignante, ce qui constitue une intrusion dans sa vie privée.»

Le Conseil précise que les médias et les journalistes «doivent se soucier d'informer réellement le public et doivent faire les distinctions qui s’imposent entre ce qui est d’intérêt public et ce qui relève de la curiosité publique. (…) Ils doivent éviter de mettre l’accent sur les aspects morbides, spectaculaires ou sensationnels». Appelé à définir l'intérêt public, l'ombudsman de Radio-Canada, Julie Miville-Dechêne, estime que la vie privée de quelqu'un est d'intérêt public lorsqu’elle a «des répercussions sur sa vie publique, devient pertinente au débat sur une question d'intérêt public ou devient un sujet légitime d'intérêt public».

Quebecor ignore les reproches

La définition de l'«intérêt public» ne fait toutefois pas l'unanimité, «car c'est une notion qui renvoie à des valeurs fondamentales, comme la conception du bien et du mal», expliquait le professeur Pierre Trudel, titulaire du Centre de recherche en droit public de l'Université de Montréal, dans le cadre de l'affaire Joël Legendre cet automne. Là encore, une filiale de Quebecor, le Journal de Montréal, avait révélé l'homosexualité de l'animateur dans son consentement, ce qui avait soulevé la controverse. Le quotidien s'était défendu en plaidant que Joël Legendre est une personnalité publique.

C'est la troisième fois, que de Conseil blâme des filiales de Quebecor depuis que le conglomérat a cessé d'en reconnaître la juridiction en juin 2010. Comme les fois précédentes, le CPQ double son reproche d'un blâme pour refus de collaborer. L’Agence QMI, Le Journal de Montréal, Le Journal de Québec et Canoë ont en effet refusé de répondre de la plainte devant le Tribunal d’honneur. Selon la convention collective en vigueur, Le Journal de Québec est néanmoins tenu de publier dans ses pages toute décision du Conseil le concernant, d'après le président du syndicat de la rédaction, Denis Bolduc.

 

Voir aussi:

Affaire Legendre: de l'élasticité de l'intérêt public

Quebecor blâmé deux fois pour plagiat

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