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Loi d’accès à l’information : promesses non tenues

Elle avait pour objectif de changer la culture de secret qui régnait au sein des organismes publics sans nuire à la vie privée. Trente ans plus tard, la Loi d’accès à l’information tarde toujours à remplir pleinement ses promesses.   Par Lise Millette Elle avait pour objectif de changer la culture de secret qui régnait…

Elle avait pour objectif de changer la culture de secret qui régnait au sein des organismes publics sans nuire à la vie privée. Trente ans plus tard, la Loi d’accès à l’information tarde toujours à remplir pleinement ses promesses.

 

Par Lise Millette

Elle avait pour objectif de changer la culture de secret qui régnait au sein des organismes publics sans nuire à la vie privée. Trente ans plus tard, la Loi d’accès à l’information tarde toujours à remplir pleinement ses promesses.

La loi a été sanctionnée en mai 1982. En 2012, la culture du « caché » n’est pas disparue. Elle s’est plutôt transformée. Plusieurs organismes ne sont toujours pas assujettis à la loi. Le gouvernement a aussi permis la création de sociétés à capital mixte qui échappent aussi à la loi.

« Les mots ‘nonobstant la loi sur l’accès’ se retrouvent trop souvent dans la législation », plaide pour sa part Me Jean Chartier, président de la Commission de l’accès à l’information (CAI), qui participait le 30 novembre dernier à une journée de formation de l’école du Barreau à l’Hôtel Intercontinental de Montréal.

La Loi sur l’Accès est née des recommandations de la Commission Paré (Commission d’étude pour une éventuelle loi d’accessibilité à l’information gouvernementale incluant les renseignements personnels que détient le gouvernement sur les citoyens), tenue en 1980 Les attentes étaient nombreuses. Le premier ministre René Lévesque voulait un instrument concret pour rendre accessible aux citoyens l’information du gouvernement.

Aujourd’hui, cet objectif non atteint prend la forme d’une nouvelle revendication, dans le même esprit toutefois : un gouvernement ouvert.

Lors du congrès de novembre, le ministre de la Culture et des Communications Maka Kotto n’a pas fermé la porte à cette idée.

« Le remède définitifs à la collusion et à la corruption, ce sera la transparence », croit le président de la FPJQ Brian Myles, qui affirme qu’un caractère suspicieux accompagne généralement les demandes d’accès à l’information.

« La moindre demande d’information de la part d’un journaliste peut devenir un enjeu politique », renchérit Brian Myles.

Un point de vue partagé par Me Raymond Doray, du cabinet Lavery De Billy.

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« L’article 34 de la Loi est un exemple des choses qui ont dérapé. Cet article est devenu un puits sans fond », exprime-t-il.

En vertu de cet article, un document qui séjourne au bureau d’un membre de l’Assemblée nationale – qu’il soit ministre ou député – n’est pas accessible à moins que le membre ne le juge opportun.

Le risque d’influence politique est ainsi décuplé. Il ne suffirait, pour se soustraire à la Loi d’accès, qu’à faire « transiter » un document entre les mains d’un député pour que ce dernier ait le pouvoir d’empêcher la délivrance dudit document.  Me Doray suggère quelques avenues :

« Abolir l’article 34 et introduire dans la Loi sur l’accès la question de l’intérêt public. La commission doit parfois refuser des demandes alors que le bons sens commanderait de divulguer », a ajouté Me Doray.

La considération de l’intérêt public en matière d’accès à l’information n’est pas aussi révolutionnaire qu’on pourrait le croire. Dans la législation ontarienne, on retrouve ces notions « d’intérêt public » dans les lois aussi loin que 1990.

Selon Brian Myles, il y a peut-être lieu, également, de s’interroger sur l’obligation de lier les notions de protection de la vie privée et de l’accès à l’information au sein d’une même loi. Ces deux objectifs peuvent entrer en contradiction. Au Fédéral, d’ailleurs, ces deux missions sont distinctes

Ces pistes pourraient théoriquement faire partie des discussions pour une réforme de la Loi d’Accès. Dès sa création en 1982, la Loi a été voulue évolutive et faire l’objet de révisions ponctuelles tous les cinq ans, tel que mentionné à l’article 179. Le gouvernement du Québec accuse toutefois un retard sérieux en la matière.

« Le monde parlementaire a reporté ces révisions », a mentionné une fois de plus Me Doray.

Le président de la Commission de l’Accès, Me Jean Chartier, croit qu’il est plus que temps de rouvrir la Loi et de la moderniser.

Lise Millette est journaliste à la Presse canadienne.