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Trois questions à Dominique Wolton

Fondateur et directeur de l’Institut des sciences de la communication au CNRS, et de la revue Hermès, Dominique Wolton était de passage à Montréal la semaine dernière. Invité par la Chaire de recherche du Canada en Mondialisation, Citoyenneté et Démocratie de l’UQAM, il venait parler de son dernier livre «Informer n’est pas communiquer». Dans cet…

Fondateur et directeur de l’Institut
des sciences de la communication au CNRS, et de la revue Hermès,
Dominique Wolton était de passage à Montréal la semaine dernière.
Invité par la Chaire de recherche du Canada en Mondialisation,
Citoyenneté et Démocratie de l’UQAM, il venait parler de son
dernier livre «Informer n’est pas communiquer».

Dans cet ouvrage, il traite d’une de
ses grandes préoccupations: la cohabitation
culturelle. Selon lui, l’information
et la communication sont un des enjeux politiques majeurs du XXIe
siècle. Elles doivent contribuer à la cohabitation culturelle sans
quoi nos sociétés sont condamnées à la haine et à la guerre.

ProjetJ l’a rencontré.

Fondateur et directeur de l’Institut
des sciences de la communication au CNRS, et de la revue Hermès,
Dominique Wolton était de passage à Montréal la semaine dernière.
Invité par la Chaire de recherche du Canada en Mondialisation,
Citoyenneté et Démocratie de l’UQAM, il venait parler de son
dernier livre «Informer n’est pas communiquer».

Dans cet ouvrage, il traite d’une de
ses grandes préoccupations: la cohabitation
culturelle. Selon lui, l’information
et la communication sont un des enjeux politiques majeurs du XXIe
siècle. Elles doivent contribuer à la cohabitation culturelle sans
quoi nos sociétés sont condamnées à la haine et à la guerre.

ProjetJ l’a rencontré.

Quel rôle les journalistes
doivent-ils jouer pour favoriser la communication donc la cohabitation culturelle ?

Plus il y a d’information, pus le rôle
des journalistes est indispensable, car le récepteur ne peut
filtrer, hiérarchiser, comprendre tout et s’intéresser à tout.
Donc contrairement à ce que croient beaucoup de journalistes, plus
il y a d’information et plus il y a de supports, plus leur rôle est
fondamental, car c’est eux qui donnent la crédibilité à
l’information que l’on consomme.

Dire que l’on pourrait aujourd’hui se
passer du journaliste serait complètement démagogique. Ce serait
supposer que le journaliste ne fait que de la mise en page et de la
mise en forme. Or, ce n’est pas ce qu’il fait. Il fait des choix, il
construit l’information. C’est très important de le rappeler, car il
y a actuellement une espèce d’illusion dans l’air: depuis
l’émergence du journalisme citoyen, on croit que tout le monde peut
être journaliste, mais c’est faux.

Ça ne veut pas dire que le citoyen n’a
pas un rôle important. Il est un contre-pouvoir. Il peut apporter
des informations que n’ont pas les journalistes ou même les
contourner dans les cas où ils voudraient taire des informations.
Néanmoins, le citoyen ne peut qu’intervenir au coup par coup, il ne
peut donc pas remplacer le journaliste.

Face aux nouvelles technologies, les
journalistes sont un peu naïfs parce qu’ils son trop fascinés par
les outils. C’est eux qui devraient nous expliquer ce qu’on peut
faire ou non avec les différentes plateformes. Ils devraient nous
aider à hiérarchiser, mais ils n’osent pas porter un jugement
critique sur les technologies par peur d’être considérés comme
conservateurs.

Quel regard portez-vous sur la migration de l’imprimé vers Internet?

Que les journaux fasse un site oui, mais qu’ils suppriment le
papier comme le Jornal do Brasil par exemple, c’est ridicule. C’est penser que le support est secondaire, or
il est central, car il n’est pas juste pratique, c’est une culture
aussi.

Les journaux qui sont détenteurs d’une expérience et d’une
culture du papier n’ont par ailleurs pas le même rapport à
l’information et leurs lecteurs non plus. On n’entretient pas le même
rapport avec un écran qu’avec le papier. L’homme est tactile, le
toucher fait partie des sens de la communication, donc on ne peut
évoluer dans une culture du tout écran.

Ce, d’autant plus que les médias qui
n’existent que sur Internet ne peuvent exister que parce qu’il y a eu
d’autres supports avant et simultanément. Internet aurait beaucoup
moins de poids s’il n’y avait plus de journaux, plus de livres, plus
de supports papier.

Pour toutes ces raisons, l’écran va
créer une autre culture de l’information, mais il ne se substituera
pas aux précédentes. Il y a à mon avis un public pour chaque
support, mais l’usage de l’écran ne supprimera pas celui d’autres
supports, il le complètera. Plus d’une fois, on a pensé qu’un
nouveau support, toujours plus performant que le précédent, allait
supprimer son prédécesseur, mais c’est faux. En définitive, on
arrive à une espèce d’empilement des techniques et des supports
manifestation de la fascination des hommes pour la recherche de
communication.

Justement, que pensez-vous des
réseaux sociaux: sont-ils un canal d’information ou de
communication?

C’est plutôt un canal de
participation, de communication ou d’information relationnelle si
vous préférez. Pour le moment, ils concernent une très faible
proportion de la population mondiale et il est trop tôt pour savoir
s’ils vont réellement prendre de l’importance. Cependant, s’ils en
prennent à mon avis ce ne sera pas du côté de l’information, mais
de la communication, car ils sont une manifestation de notre
recherche de communication affective, de solidarité communautaire.

C’est en ce sens très bien, mais on
demeure dans la «communauté» et non dans la «société», donc
les réseaux sociaux ne nous permettent pas de cohabiter avec des
gens différents, ils ne nous permettent pas de cohabiter avec
l’altérité ce qui renforcerait la tolérance sociale.

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