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De la pub sur les ondes de la radio publique

Le CRTC a renouvelé mardi les licences accordées à Radio-Canada/CBC et ce, jusqu’en 2018. Parmi les décisions phares, le retour de la publicité à la radio fait grand bruit. Si la direction de la SRC s’en réjouit, les syndicats, soutenus par un grand nombre d’auditeurs, crient au scandale. Le CRTC a renouvelé mardi les licences…

Le CRTC a renouvelé mardi les licences accordées à Radio-Canada/CBC et ce, jusqu’en 2018. Parmi les décisions phares, le retour de la publicité à la radio fait grand bruit. Si la direction de la SRC s’en réjouit, les syndicats, soutenus par un grand nombre d’auditeurs, crient au scandale.

Le CRTC a renouvelé mardi les licences accordées à Radio-Canada/CBC et ce, jusqu’en 2018. Parmi les décisions phares, le retour de la publicité à la radio fait grand bruit. Si la direction de la SRC s’en réjouit, les syndicats, soutenus par un grand nombre d’auditeurs, crient au scandale.

Par Hélène Roulot-Ganzmann

Treize ans qu’elles n’avaient pas été renouvelées parce que ça n’était jamais le moment. Le radiodiffuseur public fonctionnait toujours selon des règles édictées en l’an 2000.

«Il était temps d’agir, estime Pierre C. Bélanger, professeur au Département de communication de l’université d’Ottawa. Durant toutes ces années, le monde des médias a vécu une véritable révolution technologique et Radio-Canada travaillait dans un vieux système, devenu caduc. Aujourd’hui, les règles et les attentes sont claires pour les cinq prochaines années.»

Parmi les décisions annoncées mardi par le CRTC, le retour de la publicité sur les ondes de la radio publique, en l’occurrence Espace Musique et Radio 2. Ces deux stations seront autorisées à diffuser quatre minutes de réclame par heure durant les trois prochaines années. Si Radio-Canada veut ensuite renouveler l’expérience, elle devra démontrer que cette diffusion n’a pas eu d’effet néfaste sur le marché de la publicité, qu’elle n’a pas incommodé les auditeurs, que le niveau d’investissement dans la radio s’est maintenu et que les deux stations ont préservé la même diversité dans leur programmation.

8 millions de dollars

Une décision saluée dans les minutes qui ont suivi par Hubert Lacroix, PDG de la SRC. «Dégager de nouveaux revenus grâce à ces services était un élément central du plan que nous avions élaboré pour faire face à la réduction de notre crédit parlementaire l’an dernier», déclare-t-il par voie de communiqué.

La diffusion de la publicité ne devrait pourtant générer que 8 millions de dollars par an, une goutte d’eau comparé au milliard de dollars de fonds publics.

«En fait, ce n’est qu’une victoire partielle pour Radio-Canada/CBC, commente le professeur Bélanger. Le diffuseur public demandait plus et en espérait un revenu de 15 millions. Il n’y avait pas de publicité à la radio depuis près de 40 ans. C’est un espace qu’on a tenté de protéger contre les intérêts commerciaux, au même titre que les grands parcs nationaux! La SRC a vendu son âme… et cela pour 8 petits millions de dollars!»

«Terrain glissant»

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Un avis partagé par nombre d’acteurs et d’observateurs. La Fédération nationale des communications (FNC-CSN) et le Syndicat des communications de Radio-Canada (SCRC-CSN) dénoncent de concert ce qui est, selon eux, un nouveau virage commercial. «L'introduction de publicités radiophoniques sur Espace Musique ainsi que sur Radio 2 constitue une mauvaise décision et le CRTC en est pleinement conscient», accuse Alex Levasseur, président de la SCRC.

Coup de gueule également du côté des Amis de Radio-Canada: «Les militants et donateurs conservateurs que le Premier ministre a nommés au Conseil d’administration de la SRC seront contents de la décision, a déclaré son porte-parole, Ian Morrison. Mais les millions de Canadiens qui sont attachés à la radiodiffusion publique seront en colère».

De fait, les auditeurs ont afflué par dizaines sur les blogs et les réseaux sociaux des émissions de Radio-Canada pour critiquer cette décision. «Le CRTC s’est engagé sur un terrain glissant, affirme Pierre C. Bélanger. Il a consenti à la demande de la SRC alors même qu’il n’est pas lui-même certain de son bien-fondé. La preuve, c’est qu’il n’accorde que 4 minutes par heure et pour une période d’essai de trois ans. Plus important encore, son vice-président, Tom Pentefountas, s’y est opposé et ne s’est pas gêné pour le dire!»

Rôle de cohésion nationale

L’avenir dira si le CRTC a ouvert la porte à la généralisation de la publicité sur les ondes radiophoniques publiques. Les radio privées n’ont pas encore réagi mais il est probable qu’elles ne se réjouissent que moyennement d’une décision susceptible de rogner leurs revenus, elles qui ne disposent que de la publicité pour vivre.

Cette décision n’a certainement pas fini de faire couler de l’encre. Mais déjà, elle a eu pour conséquence de mettre un voile sur toutes les autres. Le CRTC demande notamment plus de transparence dans le processus de nomination de l'ombudsman. Surtout, il rappelle le rôle de cohésion nationale que doit jouer le diffuseur public.

«C’est l’esprit de la lettre, souligne M. Bélanger. La SRC doit être un ferment de l’identité nationale. Elle doit raconter aux Canadiens, la vie canadienne dans chacune des régions canadiennes. On veut établir des minimas concernant les décrochages régionaux. On veut sentir les régions dans les bulletins nationaux. Ça n’a jamais été aussi clair. Ça fait maintenant partie des conditions pour le renouvellement des licences.»

 

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Front commun pour l'indépendance de Radio-Canada/CBC