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Gesca: «On ne mènera pas de bataille pour la survie du papier»

Près d’un mois après l’annonce par les frères Desmarais de la disparition des formules papier de tous les quotidiens du groupe Gesca, et de l’intégration des journaux régionaux à La Presse+, la vie continue dans les salles de nouvelles. Si les syndicats reconnaissent que cette «sortie» a créé une certaine inquiétude parmi leurs membres, ils…

Près d’un mois après l’annonce par les frères Desmarais de la disparition des formules papier de tous les quotidiens du groupe Gesca, et de l’intégration des journaux régionaux à La Presse+, la vie continue dans les salles de nouvelles. Si les syndicats reconnaissent que cette «sortie» a créé une certaine inquiétude parmi leurs membres, ils assurent que tout le monde souhaite maintenant monter dans le train du numérique et se dit prêt à entrer en mode transition.

Près d’un mois après l’annonce par les frères Desmarais de la disparition des formules papier de tous les quotidiens du groupe Gesca, et de l’intégration des journaux régionaux à La Presse+, la vie continue dans les salles de nouvelles. Si les syndicats reconnaissent que cette «sortie» a créé une certaine inquiétude parmi leurs membres, ils assurent que tout le monde souhaite maintenant monter dans le train du numérique et se dit prêt à entrer en mode transition.

Par Hélène Roulot-Ganzmann

Le moins confortable dans toute cette affaire, serait en fait les zones d’ombres qui subsistent, les silences de la haute direction. On sait maintenant depuis le 15 mai dernier qu’à terme, le papier ne fera plus partie que de l’histoire chez Gesca, on ne sait pas quand et encore moins combien de postes seront coupés. Dans un article paru le 22 mai dans les colonnes du Devoir, Stéphane Baillargeon évoque une échéance de deux ans et la possibilité que cette révolution entraine une véritable saignée, à savoir que les trois quarts des emplois pourraient disparaitre. Des affirmations rejetées par les syndicats contactés par ProjetJ.

«Je ne dis pas que ça va prendre dix ans avant que le papier ne disparaisse, mais ça va prendre encore un bon bout de temps», estime Louis Tremblay, président du syndicat des communications du Quotidien à Chicoutimi.

«Rien ne semble complètement défini, mais notre nouvelle éditrice nous parle de quatre à cinq ans», révèle pour sa part Alain Goupil, président du syndicat des employés de La Tribune à Sherbrooke.

«Quel que soit l’échéancier, nous serons prêts, affirme quant à lui Jean-François Néron,  président du syndicat de la rédaction du Soleil à Québec. Il s’agit d’une décision d’affaires qui ne nous appartient pas. On attend juste le go pour démarrer la transition. On pourrait crier haut et fort qu’on n’est pas d’accord. Mais si dans trois ans, le propriétaire décide que le papier, ce n’est plus rentable et qu’il ferme le journal, on ne sera pas plus avancés.»

«Ça ne m’a pas jeté à terre»

Moins d’un mois après l’annonce des frères Desmarais, la sérénité semble donc régner dans les différentes salles de nouvelles du groupe, qui avouent que si l’officialisation de la dématérialisation a pu en déconcerter certains, personne n’a véritablement été surpris.

«Ça ne m’a pas jeté à terre, confie Louis Tremblay. Les employés non plus. La direction a beaucoup investi dans le projet tablette, elle y croit, elle veut l’étendre à tout le groupe. Il n’y a rien qui soit très surprenant et on ne mènera pas la bataille pour la survie du papier. C’est sûr que certains plus que d’autres sont attachés au journal sous sa forme traditionnelle. Les lecteurs aussi car ici au Saguenay, notre diffusion est encore bonne. Nous digérons la nouvelle en nous disant qu’il y aura toujours de la place pour de l’information de qualité dans les régions. Et ce, quelle que soit la plateforme.»

Pas de panique donc au sein des rédactions, même si certaines catégories de personnel se sentent plus fragiles que d’autres. Ceux qui travaillent à la diffusion, aux abonnements, à l’impression, au tirage particulièrement puisque ces métiers vont être amenés à disparaitre. Le pupitre un peu plus aussi, les écrans risquant sans doute d’être montés à Montréal.

«De ce point du vue, c’est sûr que dans un monde idéal, nous aurions préféré avoir une application propre pour chacun des quotidiens, avoue Alain Goupil. La Tribune+, le Quotidien+, le Droit+, etc. Par orgueil régional, par sentiment d’appartenance à notre titre. La décision est plutôt de nous intégrer à La Presse+ sous forme d’onglet. Cela dit, l’application établit des grands standards de qualité et je ne vois pas pourquoi il n’en serait pas de même pour les autres titres du groupe. Ça va donc prendre du monde pour faire fonctionner l’onglet. Et même si la production devient centralisée à Montréal, ça ne signifie pas que ce sont les journalistes au pupitre qui vont en pâtir à Sherbrooke. Ils ont une formation de journalistes terrain, ils pourraient y retourner. Les coupures de postes se feront selon les règles établies, principalement en fonction de l’ancienneté.»

Questions en suspend

Raison pour laquelle, Jean-François Néron estime que les surnuméraires sont ceux qui se font le plus de soucis quant à leur avenir au sein du groupe.

[paragraphe suivant modifié à la demande du témoin]

«C’est sûr que le risque, c’est que les régions perdent en visibilité en devenant un onglet sur La Presse+. Est-ce qu’on aura besoin de moins de journalistes sur le terrain? Aujourd’hui, nous avons un bureau politique composé de quatre personnes sur la colline à Québec pour le Soleil. Est-ce que la direction va décider qu’il peut y en avoir juste un seul pour toute La Presse+? Nous espérons que non parce que nous pensons qu’il doit y avoir un traitement purement québécois de ce qui se décide à l’Assemblée nationale. Nous ne sommes pas décisionnaires, mais nous pensons que les points de vue des régions doivent persister.»

S’ils assurent que les journalistes sont prêts à monter dans le train du numérique et s’ils s’estiment même chanceux que leur propriétaire ait investi autant d’argent afin de trouver une solution à la crise qui frappe les médias écrits tout autour de la planète, ils se posent des questions quant à leur lectorat. Le taux de pénétration de la tablette en région est-il le même que dans la métropole? Les lecteurs de leur titre régional les suivront-ils sur une application tablette qui ne possède qu’un seul onglet les concernant vraiment? Ou se rabattront-ils sur la seule source d’information locale qu’il leur restera, à savoir bien souvent la télévision?

Un plan plus précis doit être présenté aux salles de nouvelles dans les prochains mois.

«En attendant, on compte bien passer un bel été et continuer à faire notre job en donnant notre meilleur, comme on l’a toujours fait, conclut Louis Tremblay. Et ce, même si le maire Tremblay pense que nous sommes des cruches!»

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