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Journalisme en région: rencontre avec une pigiste de Jonquière

Par Sophie Mangado Installée à Jonquière depuis bientôt quatre ans, Myriam Gauthier partage son temps entre un emploi de surnuméraire au Quotidien et quelques piges. Elle souligne que "la pige est un passage obligé pour un journaliste qui débute" et déplore que les établissements de formation en parlent peu, car c'est "une réalité difficile face à laquelle…

Par Sophie Mangado

Installée à Jonquière depuis bientôt quatre ans, Myriam Gauthier partage son temps entre un emploi de surnuméraire au Quotidien et quelques piges. Elle souligne que "la pige est un passage obligé pour un journaliste qui débute" et déplore que les établissements de formation en parlent peu, car c'est "une réalité difficile face à laquelle il faut être bien armé".

Voir aussi: Le journalisme en région est-il snobé?

Par Sophie Mangado – tiré du bulletin L'Indépendant de l'AJIQ

Partageant son temps entre un emploi de surnuméraire au Quotidien et quelques piges, Myriam Gauthier doutait être une «candidate intéressante» pour la rubrique La pige en région. Nous avons estimé au contraire que sa situation reflète une réalité du journalisme indépendant hors des grands centres qui méritait d'être partagée.

Où travaillez-vous, et depuis combien de temps?

Je me suis installée à Jonquière il y a bientôt 4 ans. J'arrivais de Laval pour étudier le journalisme au cégep. Mon diplôme collégial en poche, j'ai décidé de rester dans la région. J'avais fait mes premiers pas de pigiste en 2010 avec Le Saguenéen, publication des employés en lock out du Réveil. Après que le journal ait fermé ses portes en octobre de la même année,  j'ai rejoint le Courrier du Saguenay, comme pigiste toujours. Je suis surnuméraire au Quotidien depuis mars 2011, à côté de quoi je tente de développer le volet «pige».

Qui sont vos clients?

J'ai collaboré avec le magazine Opérations Forestières et de Scierie, je suis en discussion avec l'Agence Science-Presse pour un article et j'ai approché la revue Premières Nations qui s'est montrée intéressée par mes propositions, mais il n'y a rien de conclu pour le moment. Avec mon emploi de surnuméraire au Quotidien, je ne parviens pas à consacrer autant de temps que souhaité à chercher et préparer des sujets. Mon horaire varie beaucoup: l'été dernier je pouvais faire des semaines de 30 heures, entre septembre et novembre je n'ai presque pas été appelée et actuellement j'assure une quinzaine d'heures hebdomadaires. Je reçois mon horaire au mois, ça peut changer n'importe quand.

Quels sont les obstacles auxquels vous vous confrontez dans votre parcours?

L'automne dernier, alors que Le Quotidien a moins fait appel à moi, j'ai décidé de me lancer à la pige, mais je n'ai pas su par où commencer! Je ne connais pas de journaliste indépendant dans la région, je n'avais donc pas de «collègues» vers qui me tourner pour demander conseil. Le temps aussi fait défaut. Préparer des sujets nécessite un travail que je ne veux pas faire approximativement. 

Alors que j'étais prête à m'y consacrer plus assidument, Le Quotidien m'a offert davantage d'heures. Il faut composer avec ce genre d'irrégularités, d'autant plus que j'étudie à temps plein [en sciences politiques, nldr]. D'autre part, ce qui m'attire le plus est la couverture de l'actualité, or en région ce n'est pas vraiment un marché de journaliste indépendant. La pige me semble plus à même de répondre au format magazine ou à la presse spécialisée qu'à la nouvelle. Je dois miser sur des situations locales et tenter de les porter sur la scène nationale si je veux me démarquer.

Quel regard portez-vous sur la pige en région?

En région ou pas, je pense que la pige est un passage obligé pour un journaliste qui débute et je trouve dommage que l'on n'en parle pas davantage lors de la formation. C'est une réalité difficile face à laquelle il faut être bien armé. Pour ma part, pige rime avec isolement. Je fais ce métier parce que j'aime rencontrer des gens et échanger. J'aime les salles de presse, et même si j'avais de très bonnes conditions de pigiste, ça n'amènerait pas une équipe de journalistes dans mon bureau à la maison!

À quel moment avez-vous rejoint l'AJIQ, et pourquoi?

J'ai rejoint l'association au printemps 2011, à la suite de la conférence d'une journaliste venue présenter l'AJIQ au cégep. J'ai d'emblée pensé que le forum de discussions me permettrait de connaître des clients potentiels, d'accéder à l'expérience de pigistes aguerris, ou encore de réseauter. Ça s'est avéré efficace lorsque j'entamais des démarches pour la pige et que j'ai demandé conseils. D'une certaine façon, j'y ai trouvé des collègues!  Je recours aussi aux ressources en ligne: liste noire, liste de tarifs, documents tels que La pige en début de carrière, tout ça revêt un aspect pratique et utile.

Comment envisagez-vous l'avenir?

Si je peux décrocher une permanence, je serai ravie! Mais ce n'est pas la réalité actuelle. Le journalisme change tellement qu'il est difficile de définir ce que l'on veut comme avenir. Aujourd'hui un journaliste doit savoir tout faire: du web, de la vidéo, de l'écrit, de la photo. Je développe de multiples compétences, et je dois en même temps me spécialiser pour me distinguer. Couvrir l'actualité pour un quotidien est ce que je souhaiterais faire, mais je ne dois pas mettre tous mes oeufs dans le même panier. Je ne suis pas fermée à quelque opportunité que ce soit: il faut bien manger!

 

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