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L’ombudsman de Radio-Canada prône la transparence

Sur les 912 plaintes adressées l’an dernier à l’ombudsman de Radio-Canada et concernant des contenus d’information, dix seulement ont été considérées comme justifiées, au moins en partie. La Charte des valeurs, la campagne électorale provinciale et encore et toujours le confit israélo-palestinien sont les trois sujets d’actualité à avoir fait le plus réagir l’auditoire du…

Sur les 912 plaintes adressées l’an dernier à l’ombudsman de Radio-Canada et concernant des contenus d’information, dix seulement ont été considérées comme justifiées, au moins en partie. La Charte des valeurs, la campagne électorale provinciale et encore et toujours le confit israélo-palestinien sont les trois sujets d’actualité à avoir fait le plus réagir l’auditoire du diffuseur public.

Sur les 912 plaintes adressées l’an dernier à l’ombudsman de Radio-Canada et concernant des contenus d’information, dix seulement ont été considérées comme justifiées, au moins en partie. La Charte des valeurs, la campagne électorale provinciale et encore et toujours le confit israélo-palestinien sont les trois sujets d’actualité à avoir fait le plus réagir l’auditoire du diffuseur public.

Par Hélène Roulot-Ganzmann

912 plaintes en 2013-2014, contre 1130 pour l’exercice précédent. L’ombudsman de Radio-Canada, Pierre Tourangeau, aurait de quoi se réjouir de cette baisse si elle n’était pas liée au fait que le Québec a vécu dans les douze derniers mois, une période socialement plus calme que celle que son précédent rapport couvrait, et qui englobait notamment en grande partie le printemps érable. Et s’il ne devait pas regretter non plus de voir chaque année les mêmes erreurs se reproduire, et ce, malgré ses recommandations.

912 plaintes donc, 500 présentées aux services concernés après un premier tri, et trente-six ayant exigé une révision, le plaignant ne s’étant pas satisfait de la réponse apportée. En bout de ligne, l’ombudsman considère que par six fois, oui, la plainte est totalement fondée et le journaliste n’a pas respecté les Normes et pratiques journalistiques (NPJ), et que dans quatre autre cas, le reproche est en partie justifié.

Comme à chaque fois que les électeurs sont appelés aux urnes, les plaintes affluent, reprochant à tel journaliste de soutenir le fédéralisme, à tel autre, le souverainiste. La dernière campagne n’a pas fait exception mais dans aucun des cas rapportés, l’ombudsman n’a donné raison au plaignant.

«Malaise certain»

Par trois fois en revanche, Pierre Tourangeau lui a donné raison concernant la couverture du débat sur la Charte des valeurs. Il est même particulièrement sévère dans deux cas. Le premier porte sur un reportage réalisé à l’université McGill relatant des propos tranchés supposément tenus par une professeure lors d’une conférence à laquelle le journaliste n’a pas assisté. Pour les besoins de son topo, il s’en est tenu aux témoignages de deux participants, alors que deux-cent cinquante personnes assistaient au cours. Trop partial, selon l’ombudsman.

L’autre reportage donne la parole à des jeunes faisant partie d’une équipe de soccer à Vancouver, en Colombie britannique. M. Tourangeau dit avoir été plongé dans un «malaise certain» lors du visionnage, reprochant au journaliste d’avoir demandé à des enfants à l’autre bout du pays d’émettre une opinion sur un projet de charte dont on ne sait pas ce qu’ils savent.

«Il me semble ici qu’on aurait dû y penser à deux fois avant de faire porter par des enfants des opinions aussi fortes que des accusations de racisme et de discrimination sur un sujet aussi controversé dont ils ne connaissent pas grand-chose», écrit-il.

Autre thème sur lequel, année après année, l’ombudsman est obligé de trancher, le conflit israélo-palestinien. Cette fois, les plaintes sont à la baisse et par deux fois seulement, elles ont été jugées recevables. Pierre Tourangeau explique cette diminution par la situation géopolitique, l’an dernier ayant plutôt été à la reprise des pourparlers de paix, quand la direction de Radio-Canada, dans la réponse qu’elle formule aux critiques émises dans le rapport, y voit plutôt le résultat de sa nouvelle stratégie en matière du couverture du Moyen-Orient, avec l’envoi de Marie-Ève Bédard comme correspondante, non plus depuis Tel-Aviv, mais basée à Beyrouth au Liban.

«Le déménagement de notre bureau au Moyen-Orient nous permet de couvrir les événements en Israël de façon plus ciblé, en nous concentrant sur ceux qui sont de plus grande importance, peut-on lire. Nous constatons également que la couverture de notre nouvelle correspondante, qui possède une solide expérience dans la région, n’a fait l’objet d’aucune plainte.»

«Vitrine déontologique»

Mais au-delà des plaintes formulées et auxquelles il s’est attelé à répondre, Pierre Tourangeau regrette que les mêmes erreurs, les mêmes imprécisions reviennent inexorablement. Ainsi selon lui, plus le sujet est sensible, plus la salle de nouvelles devrait ériger de balises et de pare-feux.

«Bien sûr, aucun journaliste n’est à l’abri d’une erreur, précise-t-il. Et, comprenons-nous bien, je ne doute pas que ces erreurs sont commises de bonne foi. Il reste qu’on répète des erreurs grossières pourtant clairement documentées, et, surtout, que celles-ci sont diffusées ou publiées après avoir échappé à la vigilance de ceux qui sont chargés de vérifier et d’approuver les reportages. Il me semble en effet aberrant que des reportages sur un dossier qui entraine autant de révisions et de mises en garde de l’ombudsman ne déclenchent pas une série d’alarmes auprès des responsables éditoriaux avant de se retrouver en ondes ou sur le web.»

Autre sujet dont l’ombudsman se fait le fervent défenseur, la transparence à toute épreuve dont le diffuseur public devrait selon lui, faire preuve. Après en avoir longuement parlé dans son précédent rapport l’an dernier, il explique avoir rencontré l’été dernier la direction de Radio-Canada afin de lui présenter un projet de plateforme, «véritable vitrine déontologique», facilement accessible et sur laquelle devraient se retrouver l’ensemble des correctifs et mises au point portant sur les contenus d’information, des renvois vers les décisions et les sites web de l’ombudsman et du Conseil de presse du Québec, les NPJ, la procédure de plainte, mais également des articles de diverses provenances sur des cas qui soulèvent des questions d’éthique journalistique, ou qui touchent la liberté ou les pratiques de la presse.

S’il note une certaine ouverture à ce sujet, il affirme cependant avoir reçu une écoute «polie»… qui n’a pour l’heure pas porté ses fruits. De son côté la direction affirme être très intéressée par la proposition… tout en réduisant à peau de chagrin son service des relations avec l’auditoire. Dans une entrevue accordée au Devoir le mois dernier, le porte-parole de la direction, Marc Pichette, explique que le diffuseur ne pourra plus répondre à toutes les remarques individuellement et que la réplique prendra plutôt la forme d’une foire aux questions.

Dans le contexte financier dans lequel Radio-Canada se trouve, et alors que la direction annonce encore ce matin un objectif de réduction des effectifs de 25% d’ici 2020, il y a fort à parier que ce thème de la transparence fasse de nouveau l’objet d’un chapitre dans le prochain rapport annuel de l’ombudsman.

Pour lire le rapport 2013-2014 de l’ombudsman de Radio-Canada au complet, c’est ici. Pour la réponse de la direction, ici.

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