Moins de plogues, plus de journalisme
Par Mickaël Bergeron
Un des trucs qui risque de me faire quitter le journalisme un jour, c’est le publireportage caché en reportage. Ça me dégoûte littéralement. Ça m’irrite profondément. Ça me donne le goût de rugir, carrément. Bref, ça me fait chier.
Par Mickaël Bergeron, originellement paru sur son blogue la barbe
Un des trucs qui risque de me faire quitter le journalisme un jour, c’est le publireportage caché en reportage. Ça me dégoûte littéralement. Ça m’irrite profondément. Ça me donne le goût de rugir, carrément. Bref, ça me fait chier.
Le 25 août dernier, un article dans le Journal de Québec annonçait que dans le prochain magazine 7 Jours, qui appartient également à Quebecor, on aurait droit à un cahier spécial de 15 pages sur le mariage de Patrick Huard et d’Anik Jean.
Ce n’est pas une nouvelle, c’est une plogue. Un cahier spécial dans un magazine n’est pas une nouvelle, sauf quelques rares exceptions et ceci est loin d’être un événement exceptionnel.
Un article biaisé
Hier, c’était une page entière sur TVA Sports qui s’insurge que Bell et Cogeco ne distribuent pas la nouvelle chaîne spécialisée. Jusque-là, ça va, il y a le début d’une nouvelle. Sauf que.
Dans toute la page, nous n’avons que le point de vue de la direction de TVA, qui accuse évidemment les deux autres distributeurs de ne pas être très gentils. Je me disais qu’on finirait par avoir la réponse de Bell et de Cogeco sur ce que prétend TVA, sur leurs raisons de ne pas diffuser ce nouveau poste télé. Mais non. Et comme il n’y a pas la mention que ces deux entreprises ont refusé de commenter la situation, j’en conclus que le journaliste ne les a juste jamais contactés. Et c’est là que la nouvelle dérape en plogue, en placement publicitaire.
On peut résumer le message en: ils sont pas fins, ils ne veulent rien savoir, téléphoner pour vous plaindre. On peut aussi décoder: on ne s’entend pas sur le prix, on les salit un peu publiquement, on vous demande de mettre de la pression pour qu’on puisse avoir le prix que nous demandons.
Pis encore, Richard Therrien, du Soleil, nous apprend sur son blogue que la même tactique a été utilisée à l’émission Salut bonjour.
Il y a un gros jeu enfantin entre Bell et Quebecor en ce moment. Videotron refuse de diffuser RDS2 et Bell refuse de diffuser TVA Sports. C’est con et juvénile, mais tant que ça reste là, je me dis que c’est une chicane de coulisse. Triste pour le public, mais ça demeure entre eux. Mais faire de telles sorties par ses plateformes médiatiques, c’est bas.
La mince ligne rouge
Le pire là-dedans, c’est que je n’en ai pas contre l’ensemble de la convergence. Qu’un article du Journal de Montréal se retrouve dans le Nord-Est de Sept-Îles ou dans le Journal de Québec, si c’est pertinent, je comprends que ça se fasse. On fait la même chose chez mon propre éditeur.
Ploguer un évènement, une diffusion ou une publication spéciale de son propre organe, comme TVA qui plogue du TVA ou Radio-Canada qui annonce un truc de Radio-Canada, ça peut avoir une logique. Selon le dosage, ça peut passer, mais l’arrière-goût n’est pas loin. Cette habitude se frotte sur la mince ligne rouge du mauvais goût.
Je trouve toutefois que ça dérape solidement quand le Journal de Québec plogue des produits des autres entreprises de Quebecor, comme ses magazines, ses stations de télévision. Et si Astral, Cogeco ou Radio-Canada font la même chose, ça me donne tout autant le goût de vomir.
Comme a dit mon collègue André «de Sorel» Péloquin sur Twitter l’autre jour: moins de plogues, plus de journalisme, svp. Il ne faut pas se demander pourquoi le public ne fait pas confiance aux journalistes après tant de plogues si peu subtiles.
Mickaël Bergeron est journaliste pour l'hebdomadaire le Nord-Côtier à Sept-Îles, il collabore également à BangBang et au 94,1 FM.
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