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Retour au travail au JdeM: face-à-face de glace

Les 62 rescapés du lock-out au Journal de Montréal retrouveront leur pupitre dans quelques jours. Ils devront composer avec près de 200 collègues en moins et s'adapter à un tout nouvel environnement puisque le quotidien quittera l'arrondissement Plateau-Mont-Royal pour s'installer dans la Cité du multimédia, non loin du siège social de son propriétaire, Quebecor, et…

Les 62 rescapés du lock-out au Journal de Montréal retrouveront leur pupitre dans quelques jours. Ils devront composer avec près de 200 collègues en moins et s'adapter à un tout nouvel environnement puisque le quotidien quittera l'arrondissement Plateau-Mont-Royal pour s'installer dans la Cité du multimédia, non loin du siège social de son propriétaire, Quebecor, et de son agence de presse interne, QMI.

Le déménagement en plus, ces travailleurs vivront ce que leurs collègues du Journal de Québec ont vécu en 2008. Afin de savoir ce qui attend l'équipe de Montréal, Projetj s'est entretenu avec le président du syndicat de la rédaction du Journal de Québec, Denis Bolduc.

Les 62 rescapés du lock-out au Journal de Montréal retrouveront leur pupitre dans quelques jours. Ils devront composer avec près de 200 collègues en moins et s'adapter à un tout nouvel environnement puisque le quotidien quittera l'arrondissement Plateau-Mont-Royal pour s'installer dans la Cité du multimédia, non loin du siège social de son propriétaire, Quebecor, et de son agence de presse interne, QMI.

Le déménagement en plus, ces travailleurs vivront ce que leurs collègues du Journal de Québec ont vécu en 2008. Ceux-ci sont retournés au travail après 16 mois d'un long et dur conflit de travail au cours duquel ils ont alimenté, sans leurs patrons, leur propre journal Média Matin Québec. Afin de savoir ce qui attend l'équipe de Montréal, Projetj s'est entretenu avec le président du syndicat de la rédaction du Journal de Québec, Denis Bolduc.

Dans quel climat de travail êtes-vous retournés au Journal après le conflit?

Après 16 mois de lock-out, c'est sûr il y a avait beaucoup d'amertume, beaucoup de rancœur, beaucoup de colère même. L'ambiance était donc très froide, les relations avec les patrons étaient glaciales. Mais je comparerais ça à un bloc de glace et, avec le temps, un bloc de glace finit par fondre. Progressivement, les relations interpersonnelles avec les patrons sont redevenues à peu près comme elles l'étaient avant le conflit.

Qu'en est-il du respect de la convention collective?

On s'est aperçu très rapidement qu'on aurait de la difficulté à faire respecter le contrat de travail qu'on venait de négocier. On a dû déposer beaucoup de griefs dès les premiers temps et deux ans et demi plus tard, la très grande majorité n'ont toujours pas été réglés en arbitrage.

Par exemple, ça a pris deux ans à faire respecter le plancher d'emploi de 52 employés. La question du multitâche demeure encore à régler. Par ailleurs, en principe, nous sommes les seuls au sein du groupe à pouvoir couvrir le territoire de Québec, mais Quebecor continue d'y dépêcher des employés de ses autres entités. Il y a aussi un problème avec nos signatures qui n'apparaissent pas toujours quand nos textes sont repris sur d'autres plateformes.

Tout ceci ne doit pas aider les relations entre patrons et syndiqués…

Ce sont des irritants majeurs. Les gens viennent me voir tous les jours pour des accrocs à la convention collective. C'est très lourd au quotidien. Sans vouloir mettre des mots dans la bouche de qui que ce soit, on continue à nous voir comme des syndiqués paresseux qui ne veulent pas travailler. Pourtant, en publiant un quotidien pendant le conflit, on a fait la preuve qu'on était prêt à travailler plus.

Nous avons tendu la main à l'employeur à l'automne en lui proposant de s'asseoir ensemble pour régler tout ça, mais on attend encore. Peut-être que le conflit au Journal de Montréal ne nous aidait pas. On espère que les choses vont s'arranger maintenant qu'on est à la veille d'une signature à Montréal. L'entreprise se porterait bien mieux en nous considérant comme des partenaires et non comme des ennemis.

Les questions déontologiques viennent-elles aussi miner votre travail?

C'est un terrain sur lequel je ne voudrais pas m'avancer. C'est délicat. Au congrès de la FPJQ, le vice-président du syndicat de la rédaction a fait un témoignage, je n'en ajouterai pas. Ce que je peux vous dire c'est que notre convention collective prévoit que toutes les décisions du Conseil de presse concernant le Journal de Québec ou ses employés soient publiées dans nos pages, mais ce n'est pas respecté. Nous avons déposé un grief là-dessus parce que même si Quebecor s'est retiré du Conseil, notre convention l'oblige à publier ses décisions.

(Lors de l'atelier L'éléphant dans la pièce au congrès de novembre, Régis Caron, journaliste depuis 23 ans au JdeQ, a vivement dénoncé l'impact de l'idéologie de son employeur sur la ligne éditoriale du quotidien. À titre d'exemple, il a expliqué avoir rédigé un article fort critique à l'égard d'un candidat à une élection municipale qui n'a jamais été publié, car il ne cadrait pas dans l'«étroit corridor» éditorial du journal. «La profession se nourrit de la liberté d’expression, mais au Journal de Québec, celle-ci rétrécit», a-t-il insisté.)

Quel regard portez-vous sur l'issu du conflit à Montréal?

On a très peu d'information pour le moment. J'attends de voir le texte de la convention collective qui sera signé avant de faire le bilan et de comparer avec celui que nous avons signé à Québec. De notre côté, on est prêt à effectuer des tâches pour le Journal de Montréal, que ce soit de la mise en page, de la photo ou autre, en accord avec l'équipe locale bien entendu. Nous avons aussi réussi à conserver l'équipe des petites annonces en proposant d'en faire pour les autres entités du groupe, donc nous pourrions en faire pour Montréal.

Pour ce qui est de la stratégie syndicale… au hockey, on dit: «c'est facile d'être gérant d'estrade». Selon moi, on ne peut pas comprendre l'impact moral et humain d'un conflit de travail, sans l'avoir vécu. C'est très dur. On vit dans l'angoisse permanente de ne pas savoir de quoi sera fait demain.

Comme moi, les chefs syndicaux de Montréal ont dû travailler 16 heures par jour pour essayer de trouver une solution. Ils ne devaient penser qu'à ça, même dans leur sommeil. Ils ont adopté une stratégie qui n'était pas la même que la nôtre à Québec, cependant ils pensaient que c'était la bonne en fonction de leur réalité et de leur histoire. Ils auraient possiblement pu faire les choses autrement, comme nous on aurait pu aussi le faire, mais une chose est sûre: ils ont fait de leur mieux.

 

Voir aussi: Journal de Montréal: à la recherche d'un coupable

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