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Se lancer à la pige

Dans un atelier qui avait lieu dans le cadre des états-généraux du journalisme indépendant, Mariève Paradis, présidente de l’AJIQ et Marie-Josée Richard, journaliste à la pige depuis sept ans, donnent chacune leurs trucs pour arriver à vivre de leur plume. En voici quelques-uns. Dans un atelier qui avait lieu dans le cadre des états-généraux du…

Dans un atelier qui avait lieu dans le cadre des états-généraux du journalisme indépendant, Mariève Paradis, présidente de l’AJIQ et Marie-Josée Richard, journaliste à la pige depuis sept ans, donnent chacune leurs trucs pour arriver à vivre de leur plume. En voici quelques-uns.

Dans un atelier qui avait lieu dans le cadre des états-généraux du journalisme indépendant, Mariève Paradis, présidente de l’AJIQ et Marie-Josée Richard, journaliste à la pige depuis sept ans, donnent chacune leurs trucs pour arriver à vivre de leur plume. En voici quelques-uns.

Par Hélène Roulot-Ganzmann

«Se lancer à la pige, c’est comme sauter dans le vide, admet Mariève Paradis, qui a quitté les hebdos de ce qui s’appelait encore Transcontinental à l’époque, pour se mettre à son compte. Au bout de sept ans, j’ai l’impression d’avoir un bon filet grâce à des contrats réguliers et diversifiés, et une expertise que j’ai su développer.»

Primordial, selon elle, la présence sur le web par le biais d’un blogue notamment et des réseaux sociaux. Encore plus essentiel, le réseautage, qui serait selon elle le secret pour faire carrière à la pige et en vivre.

«Il ne faut jamais hésiter à rencontrer d’autres journalistes indépendants, estime-t-elle. On a toujours l’impression que nous sommes en concurrence les uns avec les autres mais il n’y a rien de plus faux. Mes plus gros contrats, ce sont des collègues qui me les ont refilés parce qu’ils n’avaient pas le temps de les prendre. Il ne faut pas hésiter à discuter de ses champs de compétences. Il y a toujours quelqu’un qui aura une bonne idée, un contact, un magazine qui pourrait être friand de ce genre de sujets, le nom d’un rédacteur en chef, etc.»

Peaufiner son portfolio

À ce jeu là, avoir les numéros des recherchistes de quelques émissions de télévision et de radio dans son téléphone intelligent peut-être bien pratique lorsqu’un journaliste à la pige se retrouve par hasard sur une scène de breaking news.

«Tu passes quelques coups de fil, tu choppes une converse, et hop, c’est des dollars qui tombent dans tes poches. Mais attention, avant de passer en ondes, dites-bien que vous voulez vous faire payer!»

Marie-Josée Richard est partie s’installer en Gaspésie il y a quelques mois. Là-bas, elle est recherchiste salariée dans une maison de production et elle continue à faire de la pige. Le métier, elle l’a appris sur le tas. Ce qui lui fait dire qu’entreprendre des études en journalisme peut-être une voie, mais pas forcément la voie royale.

«Si cette formation donne des bases solides en rédaction, elle ne permet pas forcément de se distinguer, estime-t-elle. Mieux vaut parfois avoir un baccalauréat ou une maîtrise dans un domaine connexe. Vous aurez ainsi une spécialité sur laquelle vous pourrez capitaliser. Le plus important, c’est de pouvoir présenter un portfolio aux rédacteurs en chef à qui vous allez proposer une pige. Il faut donc écrire pour le journal étudiant, travailler dans les radios communautaires, etc.»

«Ce sont de véritables passerelles pour démarrer, confirme la présidente de l’AJIQ, d’autant que ces médias te sortent de ta zone de confort. Tu vas faire des sujets sur lesquels tu n’aurais jamais pensé travailler. Et tu te développes ainsi des spécialités.»

La spécialité, un autre secret de la réussite selon les deux jeunes journalistes.

Trouver les magazines cachés

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«La beauté de ce métier, c’est que vous pouvez transformer toutes vos passions en spécialités, affirme la néo-Gaspésienne. Avant même de commencer, vous avez toutes et tous au moins trois compétences en fonction de vos expériences de vie. Si vous voulez entreprendre ce métier, c’est probablement que vous être curieux. Toutes vos lectures, toutes vos recherches sur internet, toutes les discussions que vous avez avec vos amis peuvent vous donner des idées de sujet. En fait, de tout ce que vous faites dans une journée, en tant que journaliste indépendant, peut découler un revenu à plus ou moins long terme.»

Encore faut-il savoir à qui proposer les sujets. Parce qu’il y a tous les magazines visibles, ceux qui sont en kiosque, mais il y a surtout une multitude de trades, magazines très spécialisés, souvent attachés à une organisation, un regroupement de professionnels ou une association, et qui sont constamment en recherche de bonnes idées de sujets.

«Jamais je n’aurais cru que j’écrirais un jour sur la forêt, confie Mariève Paradis, et pourtant je suis aujourd’hui rédactrice en chef, à la pige, d’Opérations forestières.»

Il n’existe pas vraiment de registres listant tous ces magazines. En faisant une recherche sur internet, il est possible d’en trouver quelques-uns, mais là encore le mieux, c’est le réseautage.

«Je n’ai jamais accepté autant de lunchs d’affaires que depuis que je suis journaliste à la pige, raconte la présidente de l’AJIQ. Ça t’oblige à sortir de ton petit cocon, de mettre un coup de pied dans ta routine. Et au fil de la discussion, tu découvres plein de magazines dont tu ne soupçonnais même pas l’existence.»

Savoir ce que l’on vaut

Bref, il faut savoir se prendre en main.

«Tu as des problèmes pour trouver des bons titres? Tu te déniches un coach. Tu n’es pas la meilleure pour entretenir tes sources? Il y a des formations pour ça, explique Marie-Josée Richard. En tant que journaliste indépendant, tu gères ton propre business. Ça a un côté stressant, mais en même temps, tout ce que tu fais, tu le fais pour toi et c’est toi seul qui en récolte les fruits.»

Mais si quelques pigistes arrivent à bien vivre de leur plume, la grande majorité en vivote et se voit souvent dans l’obligation d’accepter des contrats dans d’autres domaines. Comment parvenir à se faire payer, et bien?

Certains journalistes débutants acceptent les piges de visibilité, qui consistent à écrire gratuitement ou à bas prix pour un magazine, histoire de se faire connaître et d’exister sur le marché.

«Le problème, c’est que c’est difficile, quand on entre dans le cercle de la visibilité, d’en sortir, estime Mariève Paradis. À un moment, il faut se dire je vaux de l’argent et je vaux tant. Je n’accepte plus de contrat à 10 dollars le feuillet. Je n’accepte plus rien en dessous de 100 dollars. Un truc aussi, en début de chaque année, il ne faut pas hésiter à demander un petit +3%… au pire, le rédacteur en chef refuse, au mieux, il trouve ça normal. Mais si tu ne demandes pas, il y a peu de chance qu’il le propose.»

L’AJIQ propose de nouveau cette formation le 24 octobre de 19h à 21h. À la barre cette fois, André Lavoie.