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Un Prix de la noirceur pour les entreprises privées sil vous plaît

Dominique Lemoine, collaboration spéciale Les entreprises privées cotées en bourse devraient être admissibles au Prix de la noirceur décerné depuis cette année par la Fédération professionnelle de journalistes du Québec (FPJQ). Le Prix de la noirceur « récompense » les serviteurs de l’État, l’organisme public ou parapublic qui s’est le mieux illustré par sa volonté de camoufler…

Dominique Lemoine, collaboration spéciale

Les entreprises privées cotées en bourse devraient être admissibles au Prix de la noirceur décerné depuis cette année par la Fédération professionnelle de journalistes du Québec (FPJQ).

Le Prix de la noirceur « récompense » les serviteurs de l’État, l’organisme public ou parapublic qui s’est le mieux illustré par sa volonté de camoufler l’information et de faire obstruction au travail des journalistes (1). Son premier grand vainqueur : Hydro-Québec.


Dominique Lemoine, collaboration spéciale

Les entreprises privées cotées en bourse devraient être admissibles au Prix de la noirceur décerné depuis cette année par la Fédération professionnelle de journalistes du Québec (FPJQ).

Le Prix de la noirceur « récompense » les serviteurs de l’État, l’organisme public ou parapublic qui s’est le mieux illustré par sa volonté de camoufler l’information et de faire obstruction au travail des journalistes (1). Son premier grand vainqueur : Hydro-Québec.

Mais pourquoi les entreprises privées cotées en bourse sont-elles exclues de la définition du Prix ?

Si, comme le soutient le président sortant de la FPJQ François Bourque, les élus et les administrations publiques ont une obligation de répondre aux journalistes qui représentent le public (2), les entreprises ont elles aussi une obligation de transparence envers leurs actionnaires, qui font partie du public et qui lisent aussi les journaux.

Question camouflage d’information, Power Corporation ne donne pas sa place. Outre la rareté des interventions publiques de sa direction, un exemple éloquent est son acharnement judiciaire à ne pas rendre public les états financiers de sa filiale Gesca tel que demandé par certains de ses propres employés et actionnaires, et

« comme le prévoient les lois du marché des valeurs mobilières et auxquelles s’assujettissent tous les groupes de presse et de médias comme Gannett aux États-Unis ou Canwest, Torstar et Transcontinental au Canada », disait Pierre Karl Péladeau à ses actionnaires lors de l’assemblée annuelle 2008 de Quebecor (3).  

François Bourque ajoute que le Prix de la noirceur a été créé à l’intention des « petits despotes locaux qui nous empêchent de faire notre travail » (4). Personne ne remet en question la nécessité de dénoncer leur manque de transparence.

Cependant, ce qui vaut pour les uns vaut pour les autres. Certaines entreprises privées sont tout autant cachottières sur leurs activités et sur leur financement, lequel bien souvent et surtout en temps de crise provient aussi en partie de l’État et des contribuables.   

Par exemple, en août 2008, les Autorités canadiennes en valeurs mobilières (ACVM) ont découvert qu’au Canada trois rapports annuels sur cinq effectués par des sociétés cotées en bourse étaient erronés ou incomplets. Parmi les fautes reprochées, l’insuffisance d’information sur les sources de financement et sur la rémunération de la haute direction (5).  

S’il existe vraiment, le journalisme comme quatrième pouvoir ne doit plus surveiller que les seules institutions publiques, mais tous les acteurs, dont les entreprises influentes susceptibles d’orienter l’évolution de la société et qui bénéficient de ses subventions et autres avantages fiscaux.

Le nouveau président Brian Myles dit promettre de s’occuper du contrôle de l’information et des brimades de journalistes. Il soutient qu’« il faut aller au bâton assez vite et dénoncer ceux qui musellent les journalistes, qui bloquent l’accès à l’information » (6).

Il devrait aussi considérer le fait que la concentration de la presse mène encore trop souvent les journalistes à l’autocensure, donc au camouflage d’information sans aucune intervention humaine. Pour toutes ces raisons, les membres de la FPJQ devraient avoir la possibilité dès l’an prochain de proposer pour ce prix des entreprises privées qui contribuent à la noirceur en information.       

Dominique Lemoine
Journaliste indépendant et M.A. en communication publique

Sources :
1. « Prix de la noirceur : mettez en nomination les organismes publics les moins transparents », www.fpjq.org [section « toutes les nouvelles de la FPJQ »] 3 septembre 2009.
2. François Bourque, « Les enjeux de la course à la présidence de la FPJQ », www.fpjq.org [section « Prises de position »] 10 novembre 2009.  
3. Allocution de Pierre Karl Péladeau, président et chef de la direction de Quebecor, Assemblée annuelle de Quebecor, le 26 juin 2008.
4. François Bourque, op. cit.  
5. « 3 rapports annuels sur 5 erronés au Canada », LesAffaires.com, 13 août 2008.
6. Stéphane Baillargeon, « Congrès de la Fédération professionnelle des journalistes du Québec – Une meute en crise », Le Devoir, 16 novembre 2009

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