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L’École de journalisme de Lille veut changer de têtes

La Voix du Nord, France | L’École supérieure de journalisme de Lille recevait, hier, une cinquantaine d’élèves issus de lycées sensibles de la région. Manière de jeter des passerelles sur des cursus un peu trop balisés. Et là, c’est le drame. « Est-ce que certains se destinent à être journalistes ? » L’amphithéâtre se fige.…

La Voix du Nord, France |

L’École supérieure de journalisme de Lille recevait, hier, une cinquantaine d’élèves issus de lycées sensibles de la région. Manière de jeter des passerelles sur des cursus un peu trop balisés.

Et là, c’est le drame. « Est-ce que certains se destinent à être journalistes ? » L’amphithéâtre se fige. On entendrait couiner un téléscripteur. Puis une main se lève, hésitante, comme au ralenti. La main de Julien, 16 ans bientôt révolus. « Ça a commencé quand j’étais en primaire, fouille dans sa mémoire le 1re ES du lycée Desmoulins, au Cateau. On avait visité l’imprimerie de La Voix du Nord. Ça avait l’air intéressant. » Tellement qu’il choisit la presse pour son stage de découverte entreprise, en 4e. « J’aime écrire. D’ailleurs je voulais être écrivain, mais la conseillère d’orientation m’a dit que c’était plus une passion qu’un travail, et elle m’a orienté vers le journalisme.  » Que l’aiguilleuse excluait visiblement du registre passionnel.

Donner des couleurs au recrutement

Et pourtant, qu’il se prête bien aux emportements, ce «  joli métier », comme disait l’autre un soir d’agacement. Qu’on l’exerce ou qu’on le jauge. « Les journalistes ont mauvaise réputation », tranchent, sans prétention, Matthieu et Philippe. Les camarades de classe de Julien en veulent pour preuve « les rumeurs, les rumeurs, les rumeurs » dont les médias feraient leurs choux gras. « Et puis, il y a les paparazzi, même s’il faut faire la différence. » Toujours ça de pris.

Une cinquantaine de volontaires, en provenance de quatre établissements de la région, ont répondu, hier, à l’invitation de l’école octogénaire. Frédéric Baillot a envoyé les cartons après avoir prêché dans les classes durant l’année, relayé dans sa tâche par des étudiants. « On veut leur montrer que l’enseignement supérieur, ce n’est pas que la fac, commente le responsable du tutorat à l’ESJ. On trouve que le recrutement de l’école manque de couleurs. » L’institution cherche la parade à une « reproduction sociale » dont Pierre Bourdieu, Jiminy Cricket des journalistes, fit un objet d’études. « Si on ne fait rien, poursuit Frédéric Baillot, on aura toujours des fils de journalistes ou de fonctionnaires. Alors que si on arrive à accompagner ces jeunes, on apportera un sacré courant d’air dans les rédactions.  » Rien moins que de la discrimination positive, dans la droite lignée de la « troisième voie » ouverte par Sciences Po notamment. Les élèves qui l’emprunteraient pourront prétendre aux « bourses de vie » du conseil régional, couvrant les frais d’inscription à l’ESJ. L’école privée facture l’année 3 500 E.

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L’École supérieure de journalisme de Lille recevait, hier, une cinquantaine d’élèves issus de lycées sensibles de la région. Manière de jeter des passerelles sur des cursus un peu trop balisés.

Et là, c’est le drame. « Est-ce que certains se destinent à être journalistes ? » L’amphithéâtre se fige. On entendrait couiner un téléscripteur. Puis une main se lève, hésitante, comme au ralenti. La main de Julien, 16 ans bientôt révolus. « Ça a commencé quand j’étais en primaire, fouille dans sa mémoire le 1re ES du lycée Desmoulins, au Cateau. On avait visité l’imprimerie de La Voix du Nord. Ça avait l’air intéressant. » Tellement qu’il choisit la presse pour son stage de découverte entreprise, en 4e. « J’aime écrire. D’ailleurs je voulais être écrivain, mais la conseillère d’orientation m’a dit que c’était plus une passion qu’un travail, et elle m’a orienté vers le journalisme.  » Que l’aiguilleuse excluait visiblement du registre passionnel.

Donner des couleurs au recrutement

Et pourtant, qu’il se prête bien aux emportements, ce «  joli métier », comme disait l’autre un soir d’agacement. Qu’on l’exerce ou qu’on le jauge. « Les journalistes ont mauvaise réputation », tranchent, sans prétention, Matthieu et Philippe. Les camarades de classe de Julien en veulent pour preuve « les rumeurs, les rumeurs, les rumeurs » dont les médias feraient leurs choux gras. « Et puis, il y a les paparazzi, même s’il faut faire la différence. » Toujours ça de pris.

Une cinquantaine de volontaires, en provenance de quatre établissements de la région, ont répondu, hier, à l’invitation de l’école octogénaire. Frédéric Baillot a envoyé les cartons après avoir prêché dans les classes durant l’année, relayé dans sa tâche par des étudiants. « On veut leur montrer que l’enseignement supérieur, ce n’est pas que la fac, commente le responsable du tutorat à l’ESJ. On trouve que le recrutement de l’école manque de couleurs. » L’institution cherche la parade à une « reproduction sociale » dont Pierre Bourdieu, Jiminy Cricket des journalistes, fit un objet d’études. « Si on ne fait rien, poursuit Frédéric Baillot, on aura toujours des fils de journalistes ou de fonctionnaires. Alors que si on arrive à accompagner ces jeunes, on apportera un sacré courant d’air dans les rédactions.  » Rien moins que de la discrimination positive, dans la droite lignée de la « troisième voie » ouverte par Sciences Po notamment. Les élèves qui l’emprunteraient pourront prétendre aux « bourses de vie » du conseil régional, couvrant les frais d’inscription à l’ESJ. L’école privée facture l’année 3 500 E.

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