Contrat de Transcontinental: une lutte en 140 caractères
Le nouveau contrat imposé aux pigistes par Transcontinental sème la grogne. Forcés à céder leurs droits moraux, les journalistes indépendants organisent la résistance grâce aux médias sociaux.
Par Audrey Desrochers et Étienne Dupuis
Le nouveau contrat imposé aux pigistes par Transcontinental sème la grogne. Forcés à céder leurs droits moraux, les journalistes indépendants organisent la résistance grâce aux médias sociaux.
La journaliste indépendante Cécile Gladel appelle à la solidarité. Si les journalistes indépendants ont perdu leur bataille en 2009 contre le contrat de TVA Publications, elle croit que l’issu du combat pourrait bien être différente cette fois-ci. «Aujourd’hui, grâce aux médias sociaux, on a une plus grande écoute de la part des journalistes et de la population», explique-t-elle.
Le vice-président de l’Association des journalistes indépendants du Québec (AJIQ), André Dumont, note que la mobilisation passe en effet principalement par Internet. «On sensibilise les membres à fond via nos listes de courriel, on a créé une page Facebook et certains de nos membres tiennent des blogues.»
Cécile Gladel juge que les nombreux gazouillis envoyés dans la Twittosphère cette semaine catalysent la mobilisation. Elle se réjouit de voir que les Nathalie Collard, Marie-France Bazzo et Guy A. Lepage ont déjà pris position en faveur des journalistes indépendants.
«On veut faire parler de nous non seulement dans le monde de la pige, mais aussi dans toute la communauté journalistique du Canada», ajoute André Dumont.
Même son de cloche pour la journaliste Anne-Marie Parent, qui croit que la mobilisation au Canada anglais pourrait faire la différence cette fois-ci. «Il y a des journalistes partout au Canada qui collabore avec Transcontinental, avance-t-elle. Ils pourraient agir comme levier pour la contestation.»
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Pour Cécile Gladel, le nouveau contrat de Transcontinental imposé aux pigistes est un «copier-coller» de celui imposé par TVA publications en 2009. La journaliste indépendante qui gagne sa vie ainsi depuis 10 ans refuse de signer ce genre de contrat. «Je ne renoncerai pas à mes droits moraux, s’offusque-t-elle. Je préférerais aller flipper des burgers chez McDo que de travailler dans ces conditions.»
Anne-Marie Parent compte également refuser de signer le nouveau contrat de Transcontinental. À ses yeux, il sera par contre difficile de mobiliser tous les pigistes, même avec l’aide des médias sociaux. «Les journalistes ne sont pas toujours solidaires, mais je les comprends. Il faut qu’ils paient leur loyer et qu’ils nourrissent leurs enfants.» Elle ajoute qu’il est difficile pour les journalistes indépendants de développer une solidarité puisqu’ils n’ont aucune façon de se regrouper. «C’est difficile d’être solidaire quand on n’a pas d’ordre professionnel et qu’on travaille tous de chez nous», se désole-t-elle.
Pistes de solution
Les pigistes ont cherché écho au gouvernement en interpellant le ministre de la Culture et des Communications, Maka Kotto, sur Twitter. L’attaché de presse de M. Kotto a affirmé à Projet J que le ministre est sensible à la situation, mais qu’il ne peut pas se prononcer actuellement sur le conflit. «Il continue de suivre la situation.»
Plusieurs scénarios d’actions sont envisagés par l’AJIQ pour faire réagir Transcontinental, que ce soit le boycottage complet ou ciblé de quelques publications. André Dumont assure que la contestation qui se met en place fait réagir la compagnie. «On nous dit que Transcontinental est préoccupé par la crise, soutient le vice-président. Je suis convaincu qu’ils ne veulent pas avoir une étiquette comparable à celle de Québecor en ce qui a trait au traitement des pigistes.» Selon lui, le temps est venu de demander une loi qui reconnaîtrait le statut des journalistes indépendants et qui leur permettrait de négocier collectivement.
Bien qu’elle embrasse la cause, Anne-Marie Parent estime quant à elle qu’il est trop tard pour s’opposer à ce type de contrats. «Le problème, c’est que si je ne signe pas avec Transcontinental, je vais aller voir qui? Québecor? Ils font signer le même type de contrat.»
Peu importe la tournure que prendra la mobilisation par les médias sociaux, Cécile Gladel comme Anne-Marie Parent s’entendent pour dire qu’il risque d’y avoir une diminution de la qualité de l’information. «Avec ce type de contrat, ton texte peut être repris n’importe où. Il peut être transformé et même pris comme publicité», s’indigne Cécile Gladel. Sa collègue est du même avis. «C’est dommage, parce qu’au final, c’est monsieur et madame Tout-le-Monde qui seront les grands perdants.»
March 12, 2013
Bonjour! De petites erreurs
Bonjour! De petites erreurs se sont glissées dans cet article dans lequel je suis citée. Il est faux que «Anne-Marie Parent compte également refuser de signer le nouveau contrat de Transcontinental», puisque je ne collabore même pas aux médias de cet éditeur! À votre question: «Si vous collaboriez, signeriez-vous?» J'avais certes répondu que si j'étais une pigiste de Transcontinental, je ne signerais pas.
Je n'ai pas pu dire non plus ceci, puisque la question ne s'est pas présentée, n'étant pas une collatrice de Transcontinental: «Le problème, c’est que si je ne signe pas avec Transcontinental, je vais aller voir qui? Québecor? Ils font signer le même type de contrat.»
Par ailleurs, on me fait dire deux phrases contradictoires: «Bien qu’elle embrasse la cause, Anne-Marie Parent estime quant à elle qu’il est trop tard pour s’opposer à ce type de contrats.» C'est en contradiction avec ma première citation, où j'ai espoir que cette fois-ci la mobilisation fasse la différence (alors il n'est pas trop tard pour s'opposer à ce type de contrats!): «Même son de cloche pour la journaliste Anne-Marie Parent, qui croit que la mobilisation au Canada anglais pourrait faire la différence cette fois-ci. «Il y a des journalistes partout au Canada qui collabore avec Transcontinental, avance-t-elle. Ils pourraient agir comme levier pour la contestation.»
Enfin, je ne comprends pas pourquoi vous me faites dire ceci: «Elle ajoute qu’il est difficile pour les journalistes indépendants de développer une solidarité puisqu’ils n’ont aucune façon de se regrouper.» On a une façon de se regrouper, c'est en devenant membre de l'Association des journalistes indépendants du Québec (AJIQ)!
Ce qui est difficile, c'est plutôt que n'importe qui peut devenir journaliste, puisque le métier n'est pas réservé ni sanctionné par un ordre professionnel, alors tout le monde peut proposer des textes aux médias. Pour se monter un portfolio, les débutants acceptent de collaborer à des tarifs dérisoires, voire bénévolement, ce qui fait que les éditeurs trouveront toujours des pigistes acceptant des conditions peu reluisantes.
Mai oui, il faut se regrouper en devenant membre de l'AJIQ: plus nous sommes nombreux, plus nous avons du poids, face aux éditeurs-Goliath! Il faut que le plus grand nombre de pigistes possible se rencontre à l'Assemblée générale annuelle 2013 de l'AJIQ, qui se tiendra le 19 mars prochain au local A-2730 du pavillon Hubert-Aquin de l'UQÀM, à compter de 18 h 30. http://www.ajiq.qc.ca
Solidairement vôtre,
Anne Marie Parent (sans trait d'union!)