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Idée – Nouveaux médias: problèmes et perspectives

Éditorial de Najam Sethi à l’occasion de la Journée mondiale de la liberté de presse. Ce texte est une gracieuseté de la World Association of Newspapers and News Publishers (WAN-IFRA). Najam Sethi est éditeur du Friday Times et du Daily Times au Pakistan et lauréat 2009 de la Plume d’Or de la Liberté remise par…

Éditorial
de
Najam Sethi à
l’occasion de la Journée mondiale de la liberté de presse. Ce texte
est une gracieuseté de la World Association of Newspapers and News
Publishers (WAN-IFRA).

Najam Sethi est
éditeur du Friday Times et du Daily Times au Pakistan et lauréat
2009 de la Plume d’Or de la Liberté remise par la WAN-IFRA.
Défenseur des idéaux de liberté et de laïcité dans un pays
souvent déchiré par l’extrémisme religieux, Najam Sethi lutte
pour la liberté de la presse dans des conditions difficiles et
dangereuses. Dans son article, il étudie les problèmes et
perspectives des nouveaux médias dans son pays et dans le monde.

Éditorial
de
Najam Sethi à
l’occasion de la Journée mondiale de la liberté de presse. Ce texte
est une gracieuseté de la World Association of Newspapers and News
Publishers (WAN-IFRA).

Najam Sethi est
éditeur du Friday Times et du Daily Times au Pakistan et lauréat
2009 de la Plume d’Or de la Liberté remise par la WAN-IFRA.
Défenseur des idéaux de liberté et de laïcité dans un pays
souvent déchiré par l’extrémisme religieux, Najam Sethi lutte
pour la liberté de la presse dans des conditions difficiles et
dangereuses. Dans son article, il étudie les problèmes et
perspectives des nouveaux médias dans son pays et dans le monde.

Lors d’un récent
séminaire international sur les médias, l’un des conférenciers a
souligné le rôle que les téléphones portables et le réseau
Internet en général, et les textos et les messages envoyés via
Twitter en particulier, allaient peut-être jouer dans le journalisme
citoyen et la possibilité qu’ils deviennent les nouveaux outils de
diffusion dynamique des nouvelles de dernière minute à travers le
monde. Mais il n’avait pas prévu que les SMS, Twitter et Facebook
allaient jouer un rôle révolutionnaire dans le déclenchement et
l’organisation de mouvements politiques en faveur de la démocratie
dans les sociétés fermées et répressives.

Nous avons assisté à ce
phénomène au Pakistan il y a deux ans lorsque, armés de téléphones
portables envoyant et recevant sans cesse des tweets, des milliers de
jeunes juristes et défenseurs des droits de l’homme ont galvanisé
les médias et les foules, les encourageant à renverser la dictature
militaire et les aidant à mettre en place un système judiciaire
indépendant. Plus récemment, le nouveau média des citoyens a
déclenché un grand mouvement révolutionnaire au Moyen-Orient, le
plus important depuis les révolutions des 18e et 19e siècles qui
ont modifié le rapport de force en Europe.

Le plus gros avantage de
ces nouveaux outils de diffusion est qu’ils sont bon marché,
universels et en faveur de la démocratie et de la liberté. En
effet, depuis l’invention de l’imprimerie et l’instauration de
la liberté d’expression dans certains pays, jamais la force des
mots n’avait évolué aussi rapidement à l’échelle
internationale. L’heure du journalisme citoyen et des médias
libres est venue et cela aura de lourdes conséquences pour la
démocratie et l’obligation de rendre des comptes. Mais ce que l’on entend
sur les nouveaux médias n’est pas partout positif. Deux exemples
en provenance de l’Asie du Sud montrent qu’ils sont parfois au
cœur du problème et non de la solution.

L’année dernière,
l’affaire des écoutes téléphoniques autour de Niira Radia Tapes
a mis en évidence des accointances contre nature entre d’importants
hommes d’affaires, des hommes politiques puissants, des lobbyistes
manipulateurs et des journalistes influents.
«Ce qui est surtout gênant ce sont les tentatives d’utiliser des
journalistes pour peser sur les décisions du gouvernement et
influencer les instances dirigeantes chargées de statuer sur des
questions cruciales comme la composition du gouvernement», a
constaté la commission de surveillance des médias en Asie du Sud.

La détermination avec
laquelle les médias classiques se sont efforcés d’étouffer
l’affaire est tout aussi inquiétante. Au début, seule une poignée
de journaux ont couvert l’affaire et l’ont commentée. Les autres
l’ont éludée. «L’authenticité de ces bandes sonores ne peut
pas être établie avec certitude», ont-ils expliqué. Un célèbre
présentateur télé a organisé un débat sur une grande chaîne
nationale et réuni un groupe d’experts pour analyser si les
groupes de pression portaient atteinte à la démocratie, mais a
choisi de ne pas prendre de risques en évitant d’entrer dans le
vif du sujet et de citer des noms.

L’affaire n’a éclaté
au grand jour que grâce à la pression soutenue exercée à
l’encontre du black-out médiatique des journaux et de la
télévision sur les sites des réseaux sociaux Twitter et Facebook.
Lorsque le scandale a commencé à devenir le sujet numéro un sur
Twitter en Inde, le Washington Post a écrit: «Twitter a joué un
rôle important dans le lancement de ce qui est devenu un débat
international avec la participation de la diaspora indienne». Les
enregistrements des conversations téléphoniques de Niira Radia ont
largement ébranlé la réputation des médias dans le pays.

Puissants, les médias
pakistanais s’opposent à la guerre menée par l’Occident contre
Al-Qaida et les Talibans malgré les liens stratégiques officiels
unissant le Pakistan et les États-Unis et soutenus par les
principaux partis politiques et l’armée du pays. La plupart des
journalistes martèlent que cette guerre est celle des Américains et
non du Pakistan et affirment que, si les troupes américaines se
retiraient d’Afghanistan, les Talibans et Al-Qaida disparaîtraient
purement et simplement. «Aucun musulman ne peut commettre des actes
de terrorisme contre d’autres musulmans», insistent-ils.

Ce type de raisonnement
déplacé est le fruit de trente ans d’islamisation forcée du
régime politique et du système éducatif dans le pays durant le
djihad contre l’URSS soutenu par les États-Unis et le Pakistan
dans les années 80, suivie d’un mouvement anti-américain au
Pakistan après le départ des États-Unis de la région en 1989 à
la fin de la guerre froide et les lourdes sanctions qu’ils ont
infligées au Pakistan parce qu’il continuait à développer des
armes nucléaires.

La situation est
préoccupante car cela contribue à cultiver et entretenir le
terrorisme dans le pays et que la colère et les attaques sont
souvent dirigées contre des journalistes libéraux et laïques qui
ne partagent pas les positions panislamistes de leurs collègues. Les
médias classiques les accusent d’être des «agents de la CIA» et
des «espions américains» et ces accusations ont souvent le même
effet que les condamnations similaires proférées par Al-Qaida et
les Talibans dans la région du Waziristan du Nord où des
journalistes sont régulièrement attaqués, décapités et
massacrés. Les médias pakistanais deviennent de plus en plus une
force politique extra-gouvernementale qui exprime sans ambages ses
sympathies et ses antipathies, pèse par sa virulence sur la
politique nationale et internationale et essaie entre autres de
déstabiliser l’économie et le processus électoral en préconisant
un «changement de régime» et une «révolution islamique
sanglante».

Mais tous ces dérapages
des médias sont des conséquences inéluctables de la montée des
nouvelles technologies, de la liberté qu’ils ont brusquement
acquise et de la prolifération des chaînes de télévision par
câble et satellite. Dans les années à venir, les exigences
économiques et démocratiques les obligeront sûrement à se modérer
et ils deviendront aussi responsables que les autres piliers de
l’État-nation moderne.

Source : Najam Sethi et
WAN-IFRA

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