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Le Conseil de presse veut sauver le titre professionnel

Le Conseil de presse du Québec (CPQ) refuse de porter le poids de l'échec des négociations sur le titre professionnel (JP) et tend à nouveau la main à la Fédération professionnelle des journalistes du Québec (FPJQ). Selon le secrétaire général de l'organisme, Guy Amyot, la FPJQ n'ayant pas l'appui du milieu journalistique pour mener à…

Le Conseil de presse du Québec (CPQ) refuse de porter le poids de l'échec des négociations sur le titre professionnel (JP) et tend à nouveau la main à la Fédération professionnelle des journalistes du Québec (FPJQ). Selon le secrétaire général de l'organisme, Guy Amyot, la FPJQ n'ayant pas l'appui du milieu journalistique pour mener à bien ce projet, sans la participation du Conseil elle n'arrivera à rien.

Le Conseil de presse du Québec (CPQ) refuse de porter le poids de l'échec des négociations sur le titre professionnel (JP) et tend à nouveau la main à la Fédération professionnelle des journalistes du Québec (FPJQ). Selon le secrétaire général de l'organisme, Guy Amyot, la FPJQ n'ayant pas l'appui du milieu journalistique pour mener à bien ce projet, sans la participation du Conseil elle n'arrivera à rien.

Il explique que le CPQ s'est impliqué dans le débat par la volonté de plusieurs acteurs du milieu, dont la Fédération nationale des communications (FNC), qui s'opposent majoritairement à ce que la FPJQ soit la gardienne du titre de JP. «Au départ le titre n'était pas une priorité au Conseil. Notre préoccupation première était le renforcement du conseil. Mais au fil du calendrier, on a été obligé de prendre position dans la consultation publique. En consultant nos membres, on a réalisé qu'on était directement interpellé, que le modèle présenté par la FPJQ ne passait pas.»

Le test de la réalité

La FNC, qui représente environ 2000 journalistes salariés et pigistes, estime en effet qu'«il serait incompatible avec l’intérêt public de confier à un organisme qui représente les intérêts des journalistes de gérer ce statut». «Il y aurait là un conflit d’intérêts contraire aux objectifs visant à protéger le droit du public», précise-t-elle dans le mémoire qu'elle a présenté à la ministre Christine St-Pierre dans le cadre de la consultation publique sur l'avenir de l'information. Elle poursuit: «Il appartient au Conseil de presse du Québec dont le mandat est de protéger la liberté de la presse et la défense du droit du public à une information de qualité d’appliquer les règles relatives à la gestion du titre de journaliste professionnel.»

L'opposition à la FPJQ est également forte chez les patrons de presse, selon Guy Amyot. «La majorité des entreprises membres du conseil sont contre l'établissement d'un titre. Plusieurs nous ont dit "on se pince le nez et si jamais il y avait un titre il ne faut pas que ce soit la FPJQ qui le gère".»

Dans ce contexte, sachant que la ministre de la Culture, des Communications et de la Condition féminine n'agira pas sans consensus, le secrétaire général du CPQ a rencontré le président de la FPJQ, Brian Myles, avant la tournée de consultation publique. «J'ai dit: "il faut sauver le projet, trouvons un autre modèle parce que le titre est utile, pertinent, important pour le milieu journalistique". Très rapidement, à ma grande surprise, c'est eux (NDLR: les membres du c.a de la FPJQ) qui ont proposé de former un comité conjoint, mais dans le fond, ils n'avaient pas fait leur deuil.» Pour Guy Amyot, c'est là le nœud du problème: «Depuis 2002, la FPJQ travaille ce projet. Pour le c.a, c'est la FPJQ qui est à l'origine de l'idée, donc c'est à elle seule de gérer le titre et de d'émettre la carte. Mais le modèle ne passe pas le test de la réalité, il ne fait pas consensus. Après tant d'années de travail, c'est un choc. C'est frustrant. Il y a un deuil à faire.»

Les concessions du CPQ

Guy Amyot souligne qu'il n'y a rien d'irréconciliable entre la fédération et son organisme. «On partage les mêmes valeurs. Pour nous aussi, il faut que l'indépendance du milieu journalistique soit totalement défendue. La définition de ce qu'est un journaliste, l'instance qui émettra le titre, la détermination des avantages rattachés au titre, tout cela doit être entre les mains du milieu journalistique. Le titre doit être volontaire, ouvert, il ne doit pas être une condition pour exercer le métier. Nous sommes d'accord sur tout ça.»

Sur cette base, le CPQ a fait plusieurs concessions depuis le début des pourparlers qui sont suspendus depuis fin octobre. Le Conseil ne réclame plus que les entreprises de presse adhèrent au Tribunal d'honneur de la profession pour que leurs journalistes puissent recevoir le titre de JP, un critère qui défavorisait les artisans du groupe Quebecor. Il a également proposé de déléguer au secrétariat de la FPJQ l’application, en première instance, des critères d’attribution du titre et de confier à son secrétaire général, Claude Robillard, la gestion du compte bancaire qui recevrait les paiements des demandeurs de la carte.

Au plan financier, la FPJQ et le CPQ se sont entendus pour ne pas réclamer un sou du ministère pour gérer le titre. Alors que le Rapport Payette recommande que soit attribué 100 000 dollars par an à la structure de gestion de ce statut, les deux organismes favorisent plutôt un modèle d'autofinancement. «Le but n'est pas de financer quoi que ce soit avec la carte, le comité conjoint ne fera pas d'argent avec ça, la FPJQ et le Conseil non plus», insiste Guy Amyot. Il n'y a donc pas de guerre de gros sous en jeu malgré la précarité ambiante. Tandis que le CPQ a redressé ses finances au cours de la dernière année, la FPJQ a rapporté un déficit globale de 39000 dollars lors de son récent congrès annuel. Elle a d'ailleurs annoncé une hausse annuelle des côtisations des membres de 5% par an pendant les quatre prochaînes années pour renflouer ses coffres.

Le membership de la FPJQ en jeu

Le secrétaire général du CPQ s'inquiète justement de la fuite éventuelle des membres de la FPJQ. «Je me pose la question depuis le début. J'ai demandé à Bryan s'il en faisait une question existentielle, s'il avait peur de perdre des membres parce que les gens pourraient obtenir le titre et la carte par un mécanisme parallèle. Il m'a dit non. J'avoue que j'étais un peu surpris de sa réponse.» Pour le professeur Marc-François Bernier, titulaire de la Chaire de recherche en éthique du journalisme de l'Université d'Ottawa, cet élément n'est pas à négliger. «Il serait risqué que la FPJQ soit le gestionnaire direct ou indirect du statut professionnel de journalistes, car chaque décision risquerait d’affecter son membership et son financement», écrit-il dans le mémoire qu'il a présenté à la ministre St-Pierre.

La FPJQ – qui comptait 2020 membres au terme de son récent congrès annuel – s'est plusieurs fois défendue sur ce plan. Elle assure ne pas vouloir utiliser le titre pour recruter des membres puisque, selon sa proposition, il ne serait pas nécessaire d'être membre de la fédération pour obtenir la carte de presse.

Mais pour l'éthicien, sachant que le titre de JP serait conditionnel au respect d'un code de déontologie, l'intention même de la fédération d'accorder ce statut «à tous ses membres en règle est de nature à discréditer le statut de journaliste professionnel». «Un nombre indéterminé de journalistes actuellement membres de la FPJQ n'auront pas accès à ce statut, car certaines de leurs pratiques sont incompatibles avec les règles de l'art (voyages gratuits, promotion, conflit d'intérêts, etc.). Il serait arbitraire de leur accorder automatiquement cette reconnaissance alors que les prochains demandeurs de ce statut devront se soumettre à une procédure de reconnaissance», explique-t-il.

 

Voir aussi:

Congrès de la FPJQ: vifs débats sur le titre professionnel

 

 

 

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