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Programme de journalisme à l’Université d’Ottawa: «Toutes les options sont envisageables»

Dix jours après les révélations du Journal Le Droit sur la suspension du programme en journalisme à l’Université d’Ottawa et l’existence d’un rapport interne accablant cette formation, Marc-François Bernier, professeur dans le département et ex-coordonateur du programme, explique cette décision. Mais selon lui, le sénat interne semble avoir surestimé les problèmes. Dix jours après les…

Dix jours après les révélations du Journal Le Droit sur la suspension du programme en journalisme à l’Université d’Ottawa et l’existence d’un rapport interne accablant cette formation, Marc-François Bernier, professeur dans le département et ex-coordonateur du programme, explique cette décision. Mais selon lui, le sénat interne semble avoir surestimé les problèmes.

Dix jours après les révélations du Journal Le Droit sur la suspension du programme en journalisme à l’Université d’Ottawa et l’existence d’un rapport interne accablant cette formation, Marc-François Bernier, professeur dans le département et ex-coordonateur du programme, explique cette décision. Mais selon lui, le sénat interne semble avoir surestimé les problèmes.

Par Hélène Roulot-Ganzmann

«Qu’il y ait des problèmes administratifs, oui, que l’on critique la qualité du programme, je ne suis pas d’accord», s’offusque Marc-François Bernier.

Comme Projet J l’a rapporté, un  document du sénat interne de l’Université d’Ottawa publié en mai 2012, parle de graves problèmes dans le programme de journalisme et de cours qui ne seraient rien d’autre que des expérimentations. Le rapport conclut que la formation porte atteinte à la réputation de l’université, suggère sa suspension, et se questionne même sur la pertinence de le maintenir.

Petit retour en arrière. En 2010, le programme fait son auto-évaluation à partir de statistiques, des données que l’université collige, d’informations qui se trouvent dans divers documents.

«Nous étions assez critiques, se souvient Marc-François Bernier, principal responsable de cette auto-évaluation. Nous avons fourni nos notes à l’université, qui a choisi deux évaluateurs externes, en l’occurrence deux évaluatrices, qui ont fait des visites sur les lieux et réalisé des entrevues, à la fois à l’université et dans les collèges, et qui ont conclu à peu de choses près à la même chose que nous, à savoir que le principal problème se situe dans l’arrimage entre la formation universitaire et les programmes dispensés dans les collèges. Il faut bien rappeler que le programme consiste en deux ans de formation théorique à l’Université d’Ottawa et de deux autres années de formation pratique au Collège Algonquin pour les étudiants anglophones ou à la Cité collégiale pour les francophones. Chose que le sénat sembla avoir oublié à lire ses remarques.»

Arrimage défectueux

Le rapport des évaluatrices, dont Projet J a obtenu une copie, est remis à l’université en mai 2011. Trois atouts sont soulignés, à savoir une double formation pratique et théorique de qualité, des équipements techniques de grande qualité également et un personnel compétent. Au chapitre des faiblesses, un arrimage défectueux entre les deux formations universitaire et collégiale est pointé du doigt, ainsi que la faible offre de cours en journalisme et l’absence de distinction entre les formations en journalisme et en communication.

«Le personnel administratif de l’Université d’Ottawa doit être en mesure de répondre adéquatement à toutes les questions concernant le double cheminement, peut-on notamment y lire. Ce n’est pas le cas maintenant et les étudiants en sont insécurisés. Il n’est pas normal que les préposés à l’administration du programme – conjoint, rappelons-le – ne connaissent pas les installations techniques disponibles dans les deux collèges, ni tous les professeurs des collèges associés dans ce programme.»

Une insécurité confirmée par quelques étudiantes interviewées par J-Source la semaine dernière.

Vision simpliste

Si ce rapport externe souligne effectivement des problèmes, il ne pointe rien d’insurmontable et ne parait pas aussi alarmant que ce que le rapport du sénat interne laisse supposer.

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«Celui-ci se base sur une vision simpliste des choses et ne tient pas compte du fait que le programme est double, estime Marc-François Bernier. Dire que nous ne proposons que deux cours en journalisme, c’est à la fois faux et très grave. Ça laisse croire que la formation n’est pas adéquate alors que les étudiants passent deux ans dans un collège pour apprendre toutes les techniques journalistiques.»

En cause selon lui, le fait que chacune des trois administrations veuille conserver le plein contrôle.

«Pour l’instant, les étudiants peuvent suivre la formation dans un sens comme dans l’autre, explique-t-il. Or, il serait plus logique qu’on définisse un sens, et de mon point de vue, plus pertinent de démarrer par la théorie à l’Université d’Ottawa. Mais les administrations ne parviennent pas à se mettre d’accord car elles ont peur de se faire chiper leurs étudiants!»

Manque d’esprit de corps

Les différents rapports soulignent également le manque d’esprit de corps à l’intérieur du programme en journalisme, la formation étant délitée au sein du vaste département de communication.

«Le programme compte une vingtaine d’étudiants maximum chaque année, noyés dans un département d’un millier de personnes, explique M. Bernier. Il y a des progrès à faire en ce sens. Pensez que lorsque j’en étais le coordonateur, je n’étais pas capable d’envoyer un message à mes étudiants spécifiquement! Mais depuis la publication du rapport d’évaluation externe, nous avons travaillé à donner au programme une identité propre avec l’intégration de deux cours qui sont exclusivement réservés aux étudiants en journalisme et d’un autre qui leur est obligatoire. Ainsi, les étudiants sont maintenant capables de savoir qui suit la formation en journalisme.»

Nouvelle session en 2014?

Un comité consultatif, dont fait partie Marc-François Bernier, a été mis en place et il planchera sur l’avenir de la formation cet automne. Selon l’ex-coordonateur, toutes les options sont aujourd’hui envisageables et il n’est pas certain que le programme rouvrira à l’automne 2014.

La possibilité d’alterner des sessions en collège et à l’université afin de ne pas ennuyer les étudiants avec trop de théorie et leur permettre de goûter à la pratique rapidement, est notamment envisagée.

Quant à la pertinence de garder un programme de premier cycle à l’Université d’Ottawa alors même Carleton en propose un qui fait référence en Ontario, Marc-François Bernier dit ne pas être fermé à ce questionnement.

«Mais surtout dans le cas de nos étudiants anglophones, précise-t-il. Il est d’ailleurs intéressant de noter que notre programme a d’abord été proposé aux francophones, en collaboration avec la Cité collégiale, parce qu’il n’y avait pas de programme de premier cycle en journalisme et en français en Ontario. Il a donc à mon sens toute sa pertinence. L’arrimage avec le Collège Algonquin est arrivé par la suite et celui-ci est effectivement en compétition directe avec le programme de l’Université Carleton.»

Marc-François Bernier est également membre du comité éditorial de Projet J.