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S’informer en ligne: pratiques mobiles, valeurs traditionnelles

Colette Brin, Sébastien Charlton Les médias sociaux et les appareils mobiles s’imposent de plus en plus comme outils privilégiés pour s’informer en ligne. Toutefois, au Canada, comme dans plusieurs des 36 pays étudiés pour l’édition 2017 du Digital News Report, une étude du Reuters Institute for the Study of Journalism publiée aujourd’hui, les supports traditionnels ou…

Colette Brin, Sébastien Charlton

Les médias sociaux et les appareils mobiles s’imposent de plus en plus comme outils privilégiés pour s’informer en ligne. Toutefois, au Canada, comme dans plusieurs des 36 pays étudiés pour l’édition 2017 du Digital News Report, une étude du Reuters Institute for the Study of Journalism publiée aujourd’hui, les supports traditionnels ou les marques qui y sont associées demeurent le gage d’une information fiable.

D’après les données recueillies auprès de 1529 internautes anglophones et de 1002 francophones du pays, la proportion d’utilisateurs de médias traditionnels (radio, télévision, presse papier) pour suivre l’actualité demeure stable par rapport à 2016, autour de 80 %. Seulement, ils sont de moins en moins à abreuver leur soif d’information principalement à même ces sources, peu importe l’âge (de 26 % à 21 % des répondants chez les moins de 45 ans, et de 54 % à 51 % chez les 45 ans et plus).

Les données ont été recueillies entre le 29 janvier et le 2 mars, par panel Web (sondage en ligne). En ligne, les hommes favorisent les applications et les sites associés aux marques traditionnelles pour suivre l’actualité plutôt que les réseaux sociaux, alors que les femmes utilisent les deux types de sources dans des proportions similaires. Les téléphones intelligents gagnent en popularité : 29 % des répondants s’informent principalement à partir de cet outil, même si l’ordinateur, de bureau ou portable, demeure le premier choix de 53 % des gens.

Si francophones et anglophones accèdent dans une proportion similaire (autour de 45 %) à la tablette dans leur vie quotidienne, elle est davantage mobilisée pour s’informer chez les francophones (28 % des répondants) que chez les anglophones (21 %). Cette proportion d’utilisateurs n’a pas vraiment progressé entre 2016 et 2017, excepté chez les francophones de 45 à 54 ans, où elle est passée de 26 % à 36 %. Bien qu’élevé, le résultat chez les Canadiens francophones n’est pas unique : dans des pays comme la Suède et le Royaume-Uni, par exemple, 29 % des internautes utilisent la tablette pour suivre l’actualité.

Différences entre francophones et anglophones

Les francophones canadiens se distinguent aussi de leurs concitoyens anglophones par l’adoption massive de Facebook pour lire, discuter, partager ou commenter des nouvelles : ils sont 55 % à le faire, pour 37 % des répondants anglophones. Les jeunes (71 % chez les 18-34 ans) et les femmes (61 %) sont particulièrement nombreux à utiliser cette plateforme comme outil d’information. À l’échelle internationale, seulement quelques pays d’Amérique latine (Argentine, Chili, Mexique) et d’Europe (Hongrie, Roumanie, Grèce) dépassent cette marque. Cela dit, une majorité de Canadiens s’informant à l’aide de Facebook indiquent que, la plupart du temps, ils y aperçoivent les actualités lorsqu’ils fréquentent le média social pour d’autres raisons.

D’ailleurs, le quart des consommateurs de nouvelles en ligne affirment que de voir passer des nouvelles sur les réseaux sociaux a été leur principale manière de s’informer dans la semaine précédant l’enquête. Dans ces circonstances, il n’est donc guère surprenant que les médias sociaux aient une plus grande importance dans le régime informationnel des gens qui admettent ne pas trop s’intéresser à l’actualité. Par opposition, 45 % des consommateurs de nouvelles en ligne s’orientent davantage vers une source en particulier, par son application ou son site de nouvelles, qu’ils trouvent parfois avec l’aide des moteurs de recherche.

Médias sociaux

Les internautes canadiens, tant anglophones que francophones, se montrent plutôt critiques à l’égard des médias sociaux. Alors que 51 % des répondants considèrent que les médias d’information aident à bien distinguer réalité et fiction, une croyance qui augmente avec l’âge des répondants, ils ne sont que 24 % à penser la même chose de Facebook, Twitter et cie. Et ceux qui reprochent aux médias d’information de ne pas faire un bon travail à cet égard ont rarement en meilleure estime les médias sociaux.

L’idée de payer pour des nouvelles en ligne n’est toujours pas dans les moeurs canadiennes : alors que 31 % des répondants déclarent avoir payé pour un journal imprimé dans la semaine précédant l’enquête, ils ne sont que 8 % à avoir payé pour des nouvelles en ligne dans la dernière année. Et parmi ceux qui ne l’ont pas fait, une minorité (10 %) s’attend à le faire bientôt. Si les raisons de payer pour de l’information en ligne sont variées chez nos répondants (cela permet d’avoir l’information sur leur support de prédilection, leur source préférée n’est pas disponible gratuitement, ils ont reçu une offre jugée alléchante), aucune ne s’y démarquant réellement, un argument surpasse les autres chez ceux qui choisissent de ne pas le faire : la présence de contenus gratuits, alors que 57 % d’entre eux justifient leur décision par la possibilité de s’informer en ligne sans frais. Ils ne sont en fait que 12 % à évoquer une crainte des modes de paiement en ligne.

Bref, si les acteurs traditionnels canadiens de l’information connaissent depuis plusieurs années des moments difficiles sur le plan économique, les données du Digital News Report, comme plusieurs autres études récentes d’ailleurs, rappellent qu’ils sont loin d’avoir été remplacés comme référence collective.

Le Centre d’études sur les médias est le partenaire canadien du Digital News Report, publié par le Reuters Institute for the Study of Journalism, à l’Université d’Oxford.

 

Cette histoire a été publiée à l’origine sur Le Devoir, et est republiée ici avec la permission des auteurs.