Traduction: Colette Brin, assistée par DeepL.com
La manière dont les journalistes exercent leur métier au Canada fait l’objet de débats animés qui englobent tous les sujets, de la couverture de Gaza aux statistiques sur la criminalité.
Ces débats se déroulent dans un contexte où les coupes budgétaires se succèdent, où des salles de rédaction – surtout locales – ferment leurs portes, où les contenus journalistiques sont bloquées sur Meta pour les utilisateurs canadiens. De plus, les journalistes font face à un harcèlement accru et à des accusations de partialité, le financement public suscite la controverse et la confiance du public est au plus bas, avec le risque de s’aggraver encore si les nouveaux outils d’intelligence artificielle ne sont pas utilisés avec prudence.
Tout cela a un effet déstabilisateur sur un secteur déjà en pleine mutation, mais cela fournit également un contexte dynamique pour la troisième vague du projet Journalistic Role Performance (JRP), financé en partie au Canada par une subvention du Conseil de recherches en sciences humaines. La prochaine phase de cette étude internationale rassemble des chercheurs de 59 pays du Nord et du Sud, avec une méthodologie commune.
Comme pour la dernière vague de l’étude, nous analyserons six rôles journalistiques différents :
- le rôle de chien de garde, où les journalistes protègent l’intérêt public en surveillant/remettant en question ceux qui occupent des postes de pouvoir;
- le rôle interventionniste, où la voix du journaliste fait partie intégrante de l’histoire et où il peut même agir en tant que partisan d’une cause;
- le rôle civique, où les journalistes aident le public à comprendre comment il est affecté par les décisions et les processus politiques;
- le rôle de service, qui consiste à fournir des conseils et des astuces ou des « informations utiles »;
- le rôle d’infodivertissement, où l’accent est parfois davantage mis sur le divertissement que sur l’information du public;
- le rôle de facilitateur loyal, où les journalistes soutiennent les discours des gouvernements au pouvoir ou des personnes influentes.
Les données relatives à la précédente vague du JRP ont été recueillies dans la première année de la pandémie de COVID-19. Nous allons donc examiner l’évolution du rôle des journalistes six ans plus tard. La collecte de données débutera en janvier 2026.
Lors de la précédente vague, nous avons constaté que les journalistes canadiens jouaient souvent un rôle interventionniste, qu’ils et elles traitaient beaucoup plus souvent des questions civiques que dans la plupart des autres pays, faisaient davantage appel à des experts comme sources. Ils et elles accordaient une grande importance aux reportages axés sur le public, notamment en utilisant le divertissement informatif comme moyen d’éduquer le public, soutenaient rarement les discours du gouvernement et avaient plus de mal à jouer leur rôle de surveillance en raison de contraintes budgétaires.
L’équipe internationale a publié un large éventail d’articles scientifiques, notamment sur la relation éventuelle entre i la plateforme de diffusion et les rôles journalistiques. En bref, cette relation existe, mais il y a également des similitudes dans l’exercice des rôles entre les différentes plateformes.
Une nouveauté dans le codage et d’analyse de la 3e vague: l’utilisation de l’intelligence artificielle (IA) dans le journalisme canadien. Par exemple, y a-t-il une mention explicite de l’utilisation de l’IA dans la rédaction d’articles ou dans l’analyse des données effectuée pour les articles publiés ?
Il est important de recueillir ces informations, car nous savons que les consommateurs d’actualités canadiens s’attendent à ce que les médias fassent preuve de transparence en matière d’utilisation de l’IA, et que les médias ne se sont pas encore dotés de politiques normalisées et précises à cet égard. Nous allons également explorer comment utiliser l’IA dans le cadre de notre recherche, pour aider notamment à réduire la charge de travail liée à la saisie et au codage des données, et nous publierons des articles sur nos défis et nos succès à cet égard sur ce site web.
La sélection des médias à l’étude au Canada s’est faite un peu différemment cette fois-ci. Comme convenu par l’équipe internationale, nous limitons à trois le nombre de sites d’étude pour chaque plateforme. Cela signifie que la diffusion nationale de Global News ne fera pas partie de notre échantillon télévisuel, comme c’était le cas auparavant. Les diffusions nationales de CTV et de CBC en feront à nouveau partie, ainsi que TVA pour assurer la représentation des médias francophones.
Le site web de Global News fera toutefois partie de nos sites d’étude en ligne, remplaçant HuffPost Canada qui a fermé ses portes en 2021, et s’ajoutant aux sites web précédents cbc.ca et lapresse.ca. Pour la radio, les deux grandes émissions d’information quotidiennes nationales et internationales au Canada, Your World Tonight de CBC et L’heure du monde de Radio Canada, feront à nouveau partie du corpus. Pour les journaux, ce seront les versions imprimées du Globe and Mail, du Toronto Star et du National Post.
Un autre aspect de l’étude que nous espérons améliorer est notre accès aux journalistes qui créent le contenu. Nous avons d’ailleurs rédigé un article sur la difficulté d’impliquer les journalistes dans le processus de recherche universitaire.
En tant qu’ancienne journaliste de télévision, je comprends tout à fait leurs réserves. Je plaisante souvent en disant que si j’étais encore dans une salle de rédaction, je serais réticente à coopérer avec mon moi universitaire en raison du manque de temps et de mes doutes quant à la valeur des résultats.
Certains des journalistes avec lesquels nous avons discuté lors de la deuxième vague ont fait remarquer que notre questionnaire leur offrait peu de possibilités de fournir des éléments de contexte. En partie à la suite de leurs commentaires, nous avons décidé, pour la prochaine phase du projet, de supprimer ce questionnaire et de nous concentrer sur des entretiens semi-dirigés avec des journalistes et, espérons-le, sur une observation plus approfondie de leur pratique. Cependant, d’après notre expérience, le principal obstacle pourrait être la crainte que les informations que nous partageons sur les processus amplifient les critiques dans un environnement très polarisé. Nous verrons donc comment cela se passe.
Nous espérons pouvoir organiser une autre conférence qui réunira des journalistes, d’autres producteurs et productrices de contenus et des universitaires afin de discuter des problèmes graves auxquels le secteur est confronté, dans un format axé sur les solutions. Cela a sans aucun doute été le point culminant de la dernière vague pour beaucoup d’entre nous, notamment par la publication d’un magazine en ligne et imprimé qui présentait les recherches partagées.
Mais pour l’instant, nous nous concentrons sur l’élaboration de notre plan de collecte de données. Si ce projet vous intéresse et que vous souhaitez en savoir plus, n’hésitez pas à nous.
